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Soirée hommage à Jane Birkin et projection de "Boxes"

ddadc026f0269b02961ed58440aed876.jpgDinard. Octobre 1999. J’avais la chance d’être sélectionnée pour intégrer le jury de professionnels (ce que je n’étais pas:-)) du Festival du Film Britannique de Dinard dont la présidente était Mme Jane Birkin. J’appréhendais cette rencontre : il est parfois difficile de se confronter à la réalité et de rencontrer ceux qu’on admire. A tort cette fois…parce que la réalité était exactement conforme à l’image, plus belle peut-être. Celle d’une femme bouleversante de gentillesse, de simplicité, d’humanité, de sensibilité, de talent rares, magnifiquement fantasque. Bouleversante et fantasque à l’image de  ces « Boxes ». Octobre 1999, je me souviens d’un soir, dans les brumes oniriques du Festival de Dinard, d’une conversation étrange, de l’évocation passionnée d’un projet, tellement personnelle que je m’en voulais presque d’être là, de ne pas savoir trouver les mots, de ne pas savoir ou oser les dire et les questionner.

 Cannes. Mai 2007. Cette conversation magique et étrange qu’elle a certainement oubliée me revient. « Boxes ». Jane Birkin se bat depuis 10 ans pour que ces boîtes prennent vie, « Boxes » était le projet qu’elle évoquait avec tant de passion, de fougue, d’exaltation mystérieuse et presque mystique ce jour-là.  Cannes, Mai 2007, c’est dans la salle du 60ème (dont je ne répèterai jamais assez à quel point elle est une excellente initiative, en espérant qu’une salle du 61ème, similaire, lui succèdera) qu’a lieu cet hommage à Jane Birkin avec la projection de « Boxes » en avant-première. Thierry Frémaux remercie Maria de Medeiros (une autre personne bouleversante de gentillesse et de simplicité…et de talent, mais là c’est encore une autre histoire que je vous conterai peut-être un jour), membre du jury, de sa présence puis il annonce l’arrivée de l’équipe du film (présentation que j’ai filmée, je mettrai cette vidéo en ligne après le festival). Puis, Jane Birkin, fébrile, présente ce projet qui lui tient tant à cœur, qu’elle a eu tant de mal à monter. Dix ans donc, dix longues années… La lumière s’éteint. Je retiens mon souffle. J’espère que la salle du 60ème, toute entière, en fait de même. Voilà « Boxes »…

« Un bord de mer en Bretagne : Anna (Jane Birkin), cinquante ans, anglaise, emménage dans sa nouvelle maison. Les pièces sont envahies de « boxes », les cartons de déménagement qui renferment mille objets…Mille souvenirs, surtout. Anna a vécu beaucoup de vies et son passé surgit des boîtes. Lorsqu’elle les ouvre apparaissent ceux qui ont compté dans sa vie. Ses parents, mais aussi ses enfants, et leurs pères, les morts et les vivants."

 Jane Birkin ne ressemble à personne. Ce film ne ressemble à aucun autre, même s’il porte des influences bien sûr. On songe à Ruiz ou Bergman. Et quelles références. Générique de fin. Quelques timides applaudissements. Quand la lumière reviendra, aveuglante, dérangeante, je suis certaine que la salle se lèvera, se lèvera pour manifester son enthousiasme débordant pour ce film empreint de la personnalité atypique de sa réalisatrice. La lumière revient. Les applaudissements, reprennent, si timides, trop. Trop pour un projet porté depuis 10 ans. Trop pour un film suintant de la grâce de l’existence. Trop timides pour ce film lumineux et sombre, cru(el) et poétique, grave et drôle, loufoque et réaliste à l’image encore de sa réalisatrice (et de la vie) qui filme les êtres qui ont jalonné son existence avec tendresse, tellement, qui se filme sans concession, sans fards, et qui n’en apparaît que plus impériale.

Chaque personnage est traité avec autant d’intérêt, que ce soit l’impertinence joyeuse de sa mère (Géraldine Chaplin) ou de son père (Michel Piccoli) ou la dérision, et la gravité parfois, mélancoliques d’une de ses filles (interprétée par Lou Doillon dont on se demande ici pourquoi elle ne tourne pas davantage) et par le personnage d’Annie Girardot dont chaque apparition nous fait retrouver la magnifique comédienne, tragiquement drôle, qu’elle est encore malgré tout, presque miraculeusement. Après sa magie: le miracle du cinéma.

 L’émotion est d’autant plus grande car, même s’il s’agit d’une fiction, il n’est pas difficile de reconnaître les personnes qui ont partagé la vie de la réalisatrice, Maurice Bénichou filmé avec une infinie tendresse ressemble à s’y méprendre à Serge Gainsbourg.

Ce film ne se contente pas d’être une galerie de portraits, de fantômes du passé de la vie de cette femme à un tournant de sa vie, il reflète un vrai point de vue sur le monde, un vrai regard de cinéaste, l’acuité d’un regard tendre, ironique, qui évoque avec pudeur des moments ou des sujets impudiques. Un regard qui oriente magnifiquement ses acteurs, tous y paraissant plus que jamais éclatants de talent (à commencer par Jane Birkin-actrice), incarnant des personnages brillamment dessinés, interprétés, tous attachants par leurs fêlures davantage encore que par leurs forces.

 

 Ce film ne nous laisse pas le temps de respirer, il nous étreint, nous enlace, nous saisit avec nos peurs, nos regrets, nos espoirs, nos bonheurs et ne nous lâche plus. Les fantômes du passé ressurgissent dans une cavalcade étourdissante filmée avec brio et inventivité avant de s’éclipser pour laisser place à l’avenir. Un nouvel amour. Même si tout le film est empreint de celui qu’elle porte à tous les personnages qui le traversent, l’occupent et l’habitent d’ailleurs plutôt qu’ils ne le traversent. Passé et présent, morts et vivants,  cruauté et tendresse se croisent habilement grâce à une mise en scène particulièrement inspirée. De ces boxes c’est la vie qui surgit, avec ses souvenirs parfois encombrants.

 

 Cannes 2007, minuit et quelques. Les spectateurs, déjà bruyants, déjà là et ailleurs, quittent la salle du 60ème. L’équipe du film se laisse photographier, agripper, ausculter sans ménagement. Je me contente de regarder, de loin, gênée, gênée  par les flashs des appareils qui crépitent, gênée parce que les spectateurs qui bousculent pour approcher l’équipe sont déjà dans l’instant et dans l’après, loin de ce film qui me porte et m’émeut encore, gênée parce que la magie (ou le miracle, si vous voulez) pour eux, s’est déjà éclipsée, n’a peut-être même jamais été, gênée parce que la vie, la vie à travers le prisme d’un appareil, déformée, peut-être moins réelle alors que celle qui était sur l’écran, reprend déjà et trop vite son cours. Je m’éloigne encore un peu. Du haut de la salle du 6Oème, sur le toit du Riviera, je regarde la Croisette scintiller de mille feux, presque irréelle. Les faisceaux lumineux autour du palais des festivals éclairent les mouettes qui le survolent dans leur ballet magique et surréaliste. Les flashs continuent à crépiter, impitoyables, aveuglants, surtout aveugles, presque indécents. Pour eux, les Boxes sont tellement rangées. Pour moi, elles sont encore tellement présentes. Jane, j’aurais aimé vous dire à quel point votre film m’a émue, mais je vous ai laissée dans ce tourbillon imperturbable et presque impudique  de flashs, et je suis repartie en regardant les mouettes et leur ballet poétique pour rester dans le film, le vôtre et un autre, celui de ce Cannes 2007, une autre irréalité dont je ne voudrais pas m’évader de cette évasion cinématographique.

En attendant de faire aussi le tri dans mes boxes pour vous raconter tous ces souvenirs cannois, je vous laisse avec ces quelques images encore une fois de médiocre qualité et très courte, en attendant de pouvoir mettre en ligne ma vidéo de toute la présentation du film par le toujours très passionné Thierry Frémaux.






Lien: (ajout du 8 Juin 2007) : ma vidéo de la présentation de l'équipe du film par Thierry Frémaux.

Une émotion succède à une autre, mais ne la remplace pas. Bientôt je vous parlerai du « Scaphandre et le papillon » qui a bouleversé la Croisette, qui m’a bouleversée, qui, malgré son sujet âpre, évite l’écueil du pathos pour nous donner un tableau poétique de l’existence. Celle d’un homme qui était aveugle et sourd à la beauté de l’existence, celle d’un homme que l’imagination et la mémoire vont aider à (re)vivre. Un grand et magnifique film, un autre hymne à la beauté de l’existence. Plus que cela, une leçon de vie, une hymne à l’art aussi et à son pouvoir et sa force. Un prétendant sérieux à la palme d'or 2007.

A suivre également: ma vidéo de la montée des marches de l’équipe du film de Tarantino et de très nombreux autres articles. Je vous laisse pour aller voir le très attendu « Persepolis »…et pour m'égarer dans le tourbillon cannois, mon évasion donc.

Sandra.M

Catégories : HOMMAGES DU FESTIVAL Lien permanent 9 commentaires Pin it! Imprimer

Commentaires

  • Cannes tombant encore entre mes partiels, je suis un peu largue nivo cinema....

    par contre,j'ai hate de voir ta critique du dernier tarantino...en effet,le projet grindhouse est completement denature par rapport a la version US....

    au debart, 2 film en un (tarantino et rodriguez) et les deux films sont coupe par des fausses bandes annonce assez hilarante ( machette,thaksgiving).....alors que la version pour l europe sort 2 film distinc ett quid des deux bandes annonces....

    perso, je n ai pas aime le segment tarantino car 1) il est trop bavard et repetitif et finalement c est plus une private joke pour fan inconditionel tant les references sont nombreuses....car si on compare cela a DUEL, c est nul....aussi j ai lu aue le film etait rejoute de 30 min....soupir.....

    je te conseille plus le film de rodriguez qui est vraiment tres sympa,qui se la joue vrqiment cool attitude.....

  • C'est vrai qu'il y a des rencontres qui ne sont pas décevantes, au contraire. Jane, c'est évident, fait partie de celles-là. Elle doit être incapable de tricher cette femme là.
    Entre être timide et réservée, je n'ai pas encore bien saisi tes nuances... mais tu aurais dû aller vers elle et lui rappeler que vous aviez "vécu" quelques jours ensemble. Enfin, c'est trop tard !
    Je l'attends son film. Je crois qu'il sort début juin. J'imagine bien ce dont tu parles... encore un film fait avec du sang, des larmes et de la chair. La vie quoi !

  • Mais quelle horreur ce film !!! Mon cauchemar ! Aller au cinéma pour me changer les idées, m'évader quelques instants du quotidien et, à peine assis dans la salle, voir un film qui me rappelle que j'ai du rangement à faire chez moi, des cartons à défaire, la vaisselle à laver, les poubelles à descendre, les bouteilles de bière à emmener au container à verre ! Un film sur des cartons !! Pour parler comme la réalisatrice, je n'allerai jamet voir sse film ! No, no, no !

  • L'adjectif le plus entendu à propos du film "Le scaphandre et le papillon" est "bouleversant". C'est étonnant. Avec un sujet comme ça, le film aurait pu être hilarant, drôlissime, réjouissant, ultra-poilant, carrément tordant. Non, "bouleversant", c'est très surprenant...
    A part ça, quand on a un scaphandre, on n'a pas besoin d'une palme, si ? Ou bien, si le héros retire son scaphandre, il faut lui donner 2 palmes, pas une seule. A moins que... Non, ne me dites pas qu'il n'a qu'une jambe ? Un film sur un paralysé unijambiste ? Là, c'est dégueulasse !

  • Bien sûr que c'est une bonne idée, une salle du 60ème. Prévoir une salle du 61ème pour l'année prochaine ? Pourquoi pas. Mais changer son nom tous les ans, c'est un peu idiot. La salle du 62ème, du 63ème... Non, il serait préférable de lui attribuer un nom définitif. Utilisons ce site pour organiser une grande consultation afin de trouver un nom pour cette salle. Moi, je propose de la nommer la salle Christine Albanel.

  • @ victorg: je suis un peu allergique au cinéma de Tarantino( même si j'en (re)connais les qualités donc je ne suis pas allée et n'irai probablement pas le voir.
    @ Pascale: je me suis probalement mal exprimée: je n'avais aucune envie d'aller lui parler, je voulais garder ces souvenirs (de Dinard, du film) intacts et elle était tellement assaillie que je n'aurais pu guère dire plus de deux mots trop expéditifs. Pour le reste, une de mes devises "quand on veut, on peut"et quand je souhaite réellement quelque chose aucune réserve ou timidité ou ce que tu veux ne m'arrêtent.
    @ vilain petit cannois: Dommage...drôlissime, il l'est aussi, d'une certaine manière, bon d'accord le issime en moins. La salle "vilain petit cannois"?

  • Ah ben j'avions point compris d'un sens !!!
    C'est vrai qu'impossible n'est pas Sandra.

    Le vilain petit cannois a trop de ménage à faire pour aller au cinéma !

  • Très joli article sur un film qui m'a aussi beaucoup touché. A l'image de sa réalisatrice, oui, et en même temps universel. A ne pas rater.

  • @ Neil: merci pour le commentaire! Malheureusement je crains qu'il ne reste pas longtemps à l'affiche. Ce film mérite pourtant d'être vu! Allez-y!

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