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PALMARES - Page 2

  • Bilan et palmarès du Festival de Cannes 2013 : une édition riche et éclectique

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    2013 marquait donc ma 13ème année à Cannes…et non des moindres ! Un bon festival, c’est souvent comme un grand film, il vous laisse heureux et exténué, joyeusement nostalgique et doucement mélancolique, riche d’émotions et de réflexions, parfois contradictoires.

     «Je ne me souviens plus du film, mais je me souviens des sentiments» dit Jean-Louis Trintignant en racontant une anecdote à son épouse dans le sublime film « Amour » de Michael Haneke qui reçut la palme d’or l’an passé. De ce Festival de Cannes 2013, je me souviendrai je l’espère des films (il y en a tant que je ne souhaiterais pas oublier) et aussi des sentiments, espérant qu’ils ne se perdront pas dans ce tourbillon enivrant d’images, cette multiplicité de fenêtres ouvertes sur le monde.  Quel bonheur encore cette année de vivre au centre de cette « bulle au milieu du monde » qui en est parfois aussi le reflet fracassant.

      Joanne Woodward et Paul Newman à l’honneur sur l’affiche de cette 66ème édition, avec une photo, d’une beauté étourdissante, prise sur le tournage de « A New Kind of Love » de Melville Shavelson, nous invitaient déjà à un tourbillon de cinéma, à un désir infini de pellicule, le désir infini…comme celui (de cinéma) que suscite Cannes.   Une affiche moderne et intemporelle, d’un noir et blanc joyeusement nostalgique, paradoxale à l’image de tous ces cinémas qui se côtoient à Cannes. Une affiche  à l’image de laquelle fut cette édition 2013 : un tourbillon de (la) vie, d’envies, de cinéma, d’envies de cinéma, un vertig(o)e (presque hitchcockien) troublant et envoûtant qu’est le Festival de Cannes (le tout dans un tendre et parfait équilibre).

     L’an passé, le festival a primé un film sur l’Amour absolu, un cri d’amour ultime. C’est à nouveau une histoire d’amour qui a cette année récompensée, un film fleuve jalonné de scènes et d'instants de vérité d'une beauté, et parfois d'une cruauté, déchirantes, notamment sur le hiatus social comme cette scène du dîner, une des plus vibrantes de vérité qu'ils m'ait été donné de voir au cinéma. Un prix qui ne pouvait bien sûr pas être dissocié de ses actrice que le jury de Steven Spielberg a eu l'extrême intelligence et délicatesse d'y associer. 

    Le grand prix couronne "Inside Lllewyn Davis" faisant à nouveau figurer les frères Coen au palmarès cannois, un film qui pouvait difficilement ne pas figurer au palmarès tant il est avant tout un magnifique hommage aux artistes, à ceux qui ne vivent et vibrent que pour leur art, au-delà de celui rendu à la musique folk. Un film  porté par des comédiens magnifiques, une musique ensorcelante, un scénario habile, une mise en scène brillante. Bref, un des meilleurs films des frères Coen qui justifie entièrement sa présence au palmarès.  Un enchantement mélancolique assaisonné  d’une note de burlesque. Un film qui transpire de l’amour des deux frères pour les artistes et l’art et qui leur permet de porter le leur à son paroxysme.

     Je vous avais dit en voyant "Le Passé" d'Asghar Farhadi (un de mes coups de cœur de cette édition) à quel point Bérénice Béjo très loin ici de la lumineuse Peppy Miller, est constamment crédible dans le rôle de cette mère écartelée entre son passé et l’avenir qu’elle tente de construire. Ironie du destin qui lui fait recevoir le prix d'interprétation deux ans après celui reçu par son partenaire Jean Dujardin dans "The Artist". Emmanuelle Seigner l'aurait également mérité pour "La Vénus à la fourrure" et Marion Cotillard pour le film qui restera mon coup de cœur de cette édition 2013 "The Immigrant" dont le dernier plan savamment dichotomique aurait a lui seul mérité une palme d'or.

     « Le Passé » est aussi un film remarquable parce qu’il traite du doute et nous laisse aussi dans le doute quand tant de films nous prennent par la main, cherchant à nous dicter jusqu’à nos émotions. Faut-il privilégier la loyauté au passé ou y renoncer pour s’élancer vers l’avenir ? Pour échapper au passé, il faut continuer à avancer, mais le passé ne freine-t-il et ne condamne-t-il pas ce dessein ? Asghar Farhadi a la bonne idée de  ne pas apporter de réponse et de nous laisser, comme ses personnages, avec ces questionnements. Le scénario, pour son extrême sensibilité et sa  précision rare et parce qu’il donne au spectateur un vrai rôle (finalement comme dans le film de Folman) et qui reflète si bien l’absurdité et la complexité de l’existence mériterait sans aucun doute un prix. C’est là toute la force du « Passé », d’une justesse fascinante et rare, dont le dernier plan nous laisse astucieusement interrogatifs, et émus, enfin.

    Bruce Dern a reçu là aussi un prix d'interprétation mérité pour son rôle dans cette histoire d’un vieil homme persuadé qu’il a gagné le gros lot à un improbable tirage au sort par correspondance, qui cherche à rejoindre le Nebraska pour y recevoir son gain parfait dans le rôle de ce vieux bougon sans doute moins sénile qu’il n’y parait. Un film intelligemment mis en scène et qui est, malgré ses défauts, à l’image de ce père: attachant. Un “petit” film, avec une photographie d’une splendide mélancolie, qui met joliment en scène l’amour filial (très belle scène de fin) et donne envie de profiter de ces instants inestimables en famille et d’étreindre ceux qui nous entourent et que nous aimons.

    Je me réjouis également du prix Vulcain reçu par le très beau "Grigris" de Mahamat-Saleh HAROUN  ou encore du prix de l'avenir reçu par "Fruitvale station", un film qui a la force des films britanniques de Mike Leigh ou Ken Loach et qui n'est pas non plus sans rappeler Spike Lee.

     Un beau palmarès qui reflète l'éclectisme et la richesse de cette édition 2013.

    PALMARES

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    PALME D'OR

     

    LA VIE D’ADÈLE - CHAPITRE 1 & 2 (Blue Is The Warmest Colour) réalisé par Abdellatif KECHICHE  avec Adèle EXARCHOPOULOS & Léa SEYDOUX

     Grand Prix

     INSIDE LLEWYN DAVIS réalisé par Ethan COEN, Joel COEN

     Prix de la mise en scène

     Amat ESCALANTE pour HELI

     Prix du Jury

     SOSHITE CHICHI NI NARU (Like Father, Like Son / Tel Père, Tel Fils) réalisé par KORE-EDA Hirokazu

    Prix du scénario

     JIA Zhangke pour TIAN ZHU DING (A Touch Of Sin)

     Prix d'interprétation féminine

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     Bérénice BEJO dans LE PASSÉ (The Past) réalisé par Asghar FARHADI

     Prix d'interprétation masculine

     Bruce DERN dans NEBRASKA réalisé par Alexander PAYNE

     COURTS METRAGES

     Palme d'Or

     SAFE réalisé par MOON Byoung-gon

     Mention Spéciale - Ex-aequo

     HVALFJORDUR (Whale Valley / Le Fjord des Baleines) réalisé par Gudmundur Arnar GUDMUNDSSON

    37°4 S réalisé par Adriano VALERIO

     

    CAMERA D'OR

     ILO ILO réalisé par Anthony CHEN présenté dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs

    Le jury de la CST a décidé de décerner le PRIX VULCAIN DE L’ARTISTE-TECHNICIEN à :

     Antoine HEBERLÉ, directeur de la photographie du film GRIGRIS réalisé par Mahamat-Saleh HAROUN pour le résultat remarquable de finesse et d’humilité dont le seul but a été de servir le film, dans des conditions que l’on peut imaginer difficiles.

    PRIX UN CERTAIN REGARD

    L’IMAGE MANQUANTE de Rithy PANH

    PRIX DU JURY

     OMAR de Hany ABU-ASSAD    

    PRIX DE LA MISE EN SCENE

     Alain GUIRAUDIE pour L'INCONNU DU LAC

    PRIX UN CERTAIN TALENT

     Pour l’ensemble des acteurs du film LA JAULA DE ORO de Diego QUEMADA-DIEZ

    PRIX DE L’AVENIR

     FRUITVALE STATION de Ryan COOGLER 

     PRIX DE LA CINEFONDATION

    Premier Prix :

    NEEDLE réalisé par Anahita Ghazvinizadeh

     The School of the Art Institute of Chicago, États-Unis

     Deuxième Prix :

    EN ATTENDANT LE DÉGEL réalisé par Sarah Hirtt

    INSAS, Belgique

     Troisième Prix ex aequo:

    ÎN ACVARIU (In the Fishbowl) réalisé par Tudor Cristian JURGIU

    UNATC, Roumanie

     Troisième Prix ex aequo:

    PANDY (Pandas) réalisé par Matúš VIZÁR

    FAMU, République Tchèque

    Catégories : CLÔTURE (cérémonies/films), PALMARES Lien permanent 0 commentaire Pin it! Imprimer
  • Festival de Cannes 2013: l'Inde, pays invité

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    Le Festival de Cannes est pour moi, depuis ma participation au prix de la jeunesse il y a 12 ans, un rendez-vous incontournable et cette année ne devrait pas déroger à la règle. Première annonce concernant la programmation: l’Inde sera le pays invité pour cette édition qui aura lieu du 15 au 26 Mai. Pour retrouvez tous mes articles sur le Festival de Cannes, rendez-vous sur Inthemoodforcannes.com et en attendant l’édition 2013, retrouvez mon article bilan de l’édition 2012, en cliquant ici.

    Voici le communiqué de presse du festival à ce sujet:

    « Le Festival de Cannes a choisi Goa pour annoncer qu’il accueillera en 2013 une importante délégation de cinéma indien qui viendra sur la Croisette célébrer le centenaire de la naissance du cinéma en Inde. Le 43e Festival International du Cinéma Indien (IFFI) et le Film Bazaar 2012, qui se déroulent à Goa jusqu’au 30 novembre 2012 avec le soutien du Ministère de la culture indien présentaient l’occasion idéale pour dévoiler cet événement : l’Inde sera donc en 2013 le troisième « pays invité » à Cannes après l’Egypte en 2011 et le Brésil cette année. Le Festival de Cannes se réjouit de fêter l’un des pays les plus importants de la planète cinéma, dont l’histoire et la tradition sont prestigieuses et dont l’actualité et la création démontrent chaque année leur vitalité.
    Le détail des festivités sera annoncé ultérieurement. »

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  • Compte-rendu du 65ème Festival de Cannes et de mes pérégrinations au Festival de Cannes 2012

    Un bon festival c’est souvent comme un grand film, il vous laisse heureux et exténué, joyeusement nostalgique et doucement mélancolique, riche d’émotions et de réflexions, souventcontradictoires , et il faut souvent un peu de recul pour appréhender ces multiples réflexions et émotions qu’il a suscitées, pour découvrir quelles images auront résisté à l’écoulement du temps, aux caprices de la mémoire, à ce flux et flot d’informations ininterrompues. C’est donc délibérément une semaine après cette joyeuse tornade d’émotions, d’images, de rencontres, de retrouvailles et parfois de rendez-vous manqués (parfois cinématographiques, en ayant vu une vingtaine de films dont 17 films de la compétition sur 22 et en ayant manqué 4 films figurant au palmarès) que j’ai décidé d’établir le bilan de ce 65ème Festival de Cannes avant de revenir, dans les semaines qui viennent, sur les films les plus marquants de cette édition.

    Même s’il était forcément difficile, voire impossible, de rivaliser avec l’édition 2011 (pour moi, la meilleure en 12 ans avec notamment « Melancholia » sans aucun doute un de mes plus grands chocs cinématographiques), quoiqu’en disent certains observateurs, cette édition 2012, si elle nous a proposé un cinéma particulièrement morose et pessimiste mais aussi des œuvres exprimant une quête d’amour(s) effrénée et souvent désespérée fut, comme chaque année, le révélateur ou la confirmation de grands films et auteurs et le reflet clairvoyant et souvent terrible de la société, une société en perte et quête de repères.

    Ecrire ce bilan c’est un peu mettre le mot fin sur 11 jours dont je rechigne à m’éveiller mais c’est aussi s’y replonger un peu, oublier un temps la réalité, retourner dans cette « bulle au milieu du monde dans laquelle on se réfugie, on se cache blottie contre un siège rouge dans le noir d’une grande salle » pour reprendre les propos de Bérénice Béjo à la clôture. Si cette bulle nous isole du monde, nous plonge dans une irréalité étourdissante, et cette année n’a pas dérogé à la règle, en revanche elle nous a aussi paradoxalement ramenés à ce monde, ses doutes, ses désespoirs, une parenthèse enchantée qui a mis en lumière les ombres d’un monde désenchanté, des films dans lesquels les sursauts de l’histoire (« Après la bataille ») mais surtout la crise étaient présents au premier plan ou en arrière-plan (« Killing them softly ») avec des personnages anesthésiés en quête d’une ivresse (« L’ivresse de l’argent »), de désirs (« Cosmopolis »), d’un rêve (« Reality ») ou parfois simplement d’un quotidien meilleur mais surtout d’amour(s). Un monde enragé « à en perdre la raison », avide d’amour(s), qui a du mal à communiquer, symboliquement enfermé dans l’habitacle aseptisé et clinique d’une voiture (« Holy motors », « Cosmopolis »). Des œuvres pessimistes dont la mort était bien souvent la seule issue et paradoxale respiration. Des œuvres qui s’opposaient aussi dépeignant tantôt un monde sur papier glacé, glaçant, glacial, tantôt des êtres de chair et de sang, ou « de rouille et d’os ». Tantôt des œuvres formellement radicales et des œuvres plus classiques (« Sur la route », « Mud »…). Ou des œuvres qui montraient des mondes qui s’opposaient : deux Egypte dans « Après la bataille », « Trois mondes » dans le film éponyme de Catherine Corsini. Subtile alliance et confrontation de force et de fragilité, de glamour et de cinéma d’auteur que résumait si bien l’affiche de cette 65ème édition. Marilyn, les yeux baissés, comme une invitation douce et langoureuse au rêve. A la fois sophistiquée et simple. Fragile et complexe. Moderne et intemporelle. Elégante et à fleur de peau. Le symbole idéal pour le Festival de Cannes qui concilie si bien ces beaux paradoxes. Et puis Marilyn souffle une bougie, une manière de nous rappeler que ce festival, un autre mythe, fête ses 65 ans, et qu’il découvre et célèbre le cinéma d’aujourd’hui aussi bien que celui d’hier.

    Comme souvent les films cannois ont aussi affectionné la mise en abyme comme l’avaient fait les magnifiques « Etreintes brisées », « The Artist », « Minuit à Paris » les années précédentes et cette année « Holy motors » et « Vous n’avez encore rien vu ». Le film d’Alain Resnais m’a autant éblouie et fascinée que celui de Leos Carax m’a agacée (mais je suis minoritaire, je l’admets, combien de journalistes ai-je entendu crier au génie, rares sont en revanche ceux ayant été capables de m’expliquer les raisons de leur admiration), le premier m’a semblé aussi généreux que le second m’a parue égocentrique. Et puis le documentaire de Gilles Jacob qui s’attarde sur la géographie des visages était aussi une mise en abyme d’une mise en abyme puisqu’il raconte le 60ème anniversaire du Festival et la projection de « Chacun son cinéma » dont chaque segment avait pour sujet la salle de cinéma. Projeté à l’occasion de l’anniversaire du festival qui célébrait cette année ses 65 ans, il a donné lieu au plusimprobable et magnifique générique du festival, un de ces moments cannois qui retiennent le temps et font que cinéma et réalité se rejoignent dans une joyeuse, émouvante et troublante confusion (une projection suivie d’un dîner signé Pierre Gagnaire avec un générique tout aussi impressionnant auquel j’ai eu le grand plaisir d’être conviée).

    Si je devais moi aussi m’attarder sur la géographie des visages, je retiendrais pêle-mêle : celui de William Hurt dans le film de Sandrine Bonnaire, enragé de douleur indicible, d’amour massacré, de folie désespérée ; le beau visage de Raphaël Personnaz, ravagé par la culpabilité dans « Trois mondes » ; celui d’Isabelle Huppert, fantaisiste et mélancolique à souhait dans le film ludique et rohmerien de Hong Sang-Soo. Celui de Robert Pattinson, judicieusement cynique et sinistre, présent dans tous les plans de « Cosmopolis », une vraie révélation. Celui de Mahmoud, le cavalier de la place Tahrir, dans le sublime et significatif dernier plan de « Après la bataille » ; ceux d’Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant douloureusement enlacés dans leur tendre et ultime amour jusqu’au dernier souffle dans le film d’Haneke. Celui d’Emilie Dequenne sur la musique de Julien Clerc, saisissant de douleur et d’émotion (au passage, signalons que face à elle une autre révélation de Cannes, Tahar Rahim est sidérant de justesse et Niels Arestrup plus inquiétant que jamais). Si je devais retenir une musique, ce serait un Impromptu de Schubert que j’aimais déjà tant désormais indissociable du film d’Haneke, infiniment triste et beau. La voix puissante de Beth Ditto à l’ouverture. La musique de Mark Snow d’une puissance émotionnelle renversante dans « Vous n’avez encore rien vu ». Et puis tant de regards. Trop souvent désabusés. Heureusement aussi souvent passionnés. Des regards de cinéastes si incisifs et tristement lucides sur notre époque. Des bruits aussi. Ceux d’une Croisette insomniaque. Ceux d’une presse vengeresse. Ceux de ces médias carnassiers qui ne laissent pas le temps à la pensée de s’exprimer alors que, justement, la richesse de Cannes est de nous faire découvrir des œuvres exigeantes qui nécessitent un peu de recul et un peu plus que ces réactions passionnelles et souvent brutales. Ceux des applaudissements, parfois conventionnels ou de politesse, parfois ne pouvant plus arrêter leur course folle à vous faire chavirer de bonheur et d’émotion comme ce fut le cas pour « De rouille et d’os », « Amour », « A perdre la raison », « J’enrage de son absence ».

    Je retiendrai encore que ce festival a couronné l’ « Amour » d’une palme d’or, « Reality » d’un grand prix. Paradoxe cannois que de primer deux films qui sont pour le premier d’une certaine manière l’antithèse de Cannes, pour le second une sorte de miroir. Dans le premier : l’Amour absolu, un cri d’amour ultime et désespéré qui montre ce qui est « caché » avec une infinie pudeur et délicatesse alors que tant, à Cannes, s’enivrent de rencontres et plaisirs éphémères. Dans le second, le rêve d’un homme qui ne voit le bonheur possible que dans le regard d’une multitude d’autres, fut-ce au mépris de sa dignité, une fable qui aboutit à la désillusion, sorte de miroir de Cannes, aussi. Et comme Luciano, le personnage principal, qui finit par imaginer qu’un criquet l’espionne, l’omniprésence médiatique à Cannes fait parfois perdre le sens des réalités et imaginer être dans un immense Truman show.

    Lors de la conférence de presse du jury à laquelle j’ai eu le plaisir d’assister Nanni Moretti a déclaré que tous les prix auraient pu revenir à « Amour » (le règlement ne permet pas à un film d’avoir un autre prix en plus de la palme d’or) et qu’aucun prix n’avait fait l’unanimité du jury. « Amour », trois ans après la palme d’or pour « Le Ruban blanc » fait ainsi entrer Michael Haneke dans le cercle très fermé des cinéastes doublement palmés. En plus de sa maitrise formelle incontestable, « Amour » est un film tragique, bouleversant, universel qui nous ravage, un film lucide, d’une justesse et d’une simplicité remarquables, tout en retenue. Un film éprouvant et sublime, d’une beauté tragique et ravageuse que vous hante et vous habite longtemps après la projection, après ce dernier plan d’une femme seule dans un appartement douloureusement vide.

    «Je ne me souviens plus du film, mais je me souviens des sentiments» dit Jean-Louis Trintignant en racontant une anecdote à son épouse dans le sublime film « Amour » de Michael Haneke. C’est aussi ce que je pourrais dire de mon film du Festival de Cannes. Je serais incapable de vous raconter ces 11 jours, en revanche m’en restent des sentiments forts : la fascination devant le long premier plan-séquence de « Reality » ; l’admiration devant ce premier plan de « Like Someone in love », cette manière de capter notre attention, de laisser le spectateur libre, la richesse, la force et la douceur du cinéma de Kiarostami envoûtant et pluriel comme un air de jazz ; l’admiration encore devant la beauté froide et triste et la richesse du scénario de « Dans la brume » de Sergei Loznitsa (qui a d’ailleurs obtenu le prix de la critique internationale) ; le bouleversement devant la fin de « A perdre la raison » et sa violence absolue hors-champ qui m’a rappelée ce plan de « Tess » projeté à Cannes Classics cette année, cette tâche de sang qui s’étend et en dit plus que n’importe quelle démonstration de force et violence ; un sentiment fugace et salvateur de légèreté devant « In another country » ; les frissons devant la poésie étourdissante des premières images du prochain film de Wong Kar Wai (séance surprise du festival avec projections de bandes-annonces) ; le vertige sensoriel devant « De rouille et d’os », mélange habile et poignant de rudesse et de délicatesse, qui culmine dans ces derniers mots, cri d’amour et d‘espoir poignant et dévastateur.

    Ce même vertige sensoriel devant le film d’Alain Resnais dont je ne peux m’empêcher de vous parler longuement à nouveau qui a suscité ce qui arrive parfois au théâtre, cette émotion presque irrationnelle, lorsqu’il y a ce supplément d’âme, de magie, lorsque ce pouvoir des mots vous embarque ailleurs, vous hypnotise, vous fait oublier la réalité, tout en vous ancrant plus que jamais dans la réalité, vous faisant ressentir les palpitations de la vie. Chaque phrase prononcée, d’une manière presque onirique, magique, est d’une intensité sidérante de beauté et de force et exalte la force de l’amour. Mais surtout Alain Resnais nous livre ici un film inventif et ludique. Il joue avec les temporalités, avec le temps, avec la disposition dans l’espace (usant parfois aussi du splitscreen entre autres « artifices »). Il donne à jouer des répliques à des acteurs qui n’en ont plus l’âge. Cela ne fait qu’accroître la force des mots, du propos, leur douloureuse beauté et surtout cela met en relief le talent de ses comédiens. Rarement, je crois, j’aurais ainsi été émue et admirative devant chaque phrase prononcée quel que soit le comédien. A chaque fois, elle semble être la dernière et la seule, à la fois la première et l’ultime. C’est une des plus belles déclarations d’amour au théâtre et aux acteurs, un des plus beaux hommages au cinéma qu’il m’ait été donné de voir et de ressentir. Contrairement à ce qui a pu être écrit ce n’est pas une œuvre posthume mais au contraire une mise en abyme déroutante, exaltante d’une jeunesse folle, un pied-de-nez à la mort qui, au théâtre ou au cinéma, est de toutes façons transcendée. C’est aussi la confrontation entre deux générations ou plutôt leur union par la force des mots. Ajoutez à cela la musique de Mark Snow et vous obtiendrez un film inclassable et si séduisant (n’usant pourtant d’aucune ficelle pour l’être mais au contraire faisant confiance à l’intelligence du spectateur). Ce film m’a enchantée, bouleversée, m’a rappelé pourquoi j’aimais follement le cinéma et le théâtre, et les mots. Ce film est d’ailleurs au-delà des mots auquel il rend pourtant un si bel hommage. Malgré tout ce que je viens de vous en dire, dîtes-vous que de toutes façons, « Vous n’avez encore rien vu ». C’est bien au-delà des mots et cela fait un bien fou dans un lieu comme Cannes où ils sont tant galvaudés …

    Je retiendrai encore des retrouvailles trop brèves, des émotions intenses, des hasards et coïncidences troublants. Ce sentiment aussi d’avoir vécu un film de 11 jours déroutant, souvent enthousiasmant, parfois une histoire sans fin et puis cette impression que si Cannes est un paradis pour les cinéphiles, il ne l’est pas pour les âmes sensibles comme le disait Gilles Jacob dans son livre « La vie passera comme un rêve », la mienne ayant été souvent mise à rude épreuve.

    Cannes, c’est la vie en concentré. Plus belle et plus violente. Plus déconcertante et exaltante. Plus dérisoire et urgente. Comme sur l’écran, tout y est plus triste, plus tragique, plus intense, tellement excessif. Chacun se pare d’un masque, souvent de vanité, parfois d’hypocrisie, me faisant songer à cette citation de Molière tellement à propos à Cannes « L’hypocrisie est un vice à la mode et tous les vices à la mode passent pour vertu ». Cannes, « c’est une joie et une souffrance » , pourrais-je dire en paraphrasant Truffaut. La joie de vivre au rythme de sa passion. La souffrance de voir des passions moins nobles l’emporter. La joie de faire taire la réalité. La joie de voir la vie ressembler à du cinéma. La joie d’être immergée dans un monde de cinéma et de se plonger dans des regards et des univers de cinéastes captivants, dérangeants, en tout cas éminemment talentueux. La joie de partager sa passion, de passer ses journées au rythme du cinéma. Oui, la joie l’emporte forcément.

    Une certitude subsiste : que j’aime Cannes et le cinéma à la folie, toujours et encore et malgré tout, ce vertige émotionnel et cinématographique qui vous enivre, mais beaucoup moins ceux qui font le leur et le prennent pour prétexte à l’expression de leurs frustrations, beaucoup moins ceux qui se gavent et se grisent, beaucoup moins ceux qui piétinent les autres et leur orgueil pas même pour un quart d’heure cher à Warhol. Je déplore la présence voire l’omniprésence des marques pour qui Cannes n’est qu’une vitrine et plus un festival de cinéma.

    J’en retiens un voyage dans les cinématographies, les espoirs et les tourments du monde entier exigeant, passionnant, instructif; l’envie toujours et plus que jamais viscérale d’écrire et de partager cette passion qui ne s’étiole pas avec les ans. Enfin, je précise (suite à quelques réflexions à ce sujet) que, comme chaque année, je ne devais mon accréditation et ma présence à Cannes à aucun sponsor, que ma contribution pour d’autres sites a été réalisée à titre gracieux. L’occasion aussi de souhaiter conserver cette indépendance mais aussi de faire évoluer mes blogs, d’écrire ou m’exprimer pour d’autres médias, la prise de conscience de l’utilisation par certaines marques des écrits des blogueurs comme une matière indifférenciée, simplement dictée par l’audience et la visibilité, et non la qualité.

    Alors, sans aucun doute serai-je à Cannes pour la treizième fois l’an prochain, revenant à mes premières amours, à cette émotion qui ne manque pas de m’étreindre quand je pénètre chaque année pour la première fois dans le Grand Théâtre Lumière, a fortiori cette année, aux premières loges pour l’ouverture. Non, jamais je n’oublierai cette émotion dont j’éprouve chaque année la douce et violente réminiscence, jamais je n’oublierai ces moments exaltants de cinéma qui vous élèvent et qui éclairent et illuminent la réalité.

    Remerciements à ceux qui ont lu quotidiennement mes articles en direct du festival, surtout à un « gentleman old school » à la curiosité et la jeunesse d’esprit réjouissantes et inaltérées et qui fait de ce festival cette magnifique et inégalable manifestation cinématographique et qui a fait qu’ « une journée particulière » l’était encore plus pour moi, à ceux que j’y croise trop rarement, chaque année, de façon éphémère etjoliment irréelle, mais que je n’oublie pas pour autant, aux passionnés de cinéma avec qui j’ai eu le plaisir d’échanger pendant ce festival…

    Je vous donne rendez-vous dans les semaines à venir pour de nouveaux articles sur ce 65ème Festival de Cannes mais aussi cette semaine pour mes articles en direct du Champs-Elysées Film Festival, du 6 au 12 juin, et dont ce sera cette année la première édition, avant le Festival Paris Cinéma, fin juin, à suivre ici comme chaque année. Retrouvez également d’autres articles et visions du Festival de Cannes sur mes autres blogs http://www.inthemoodforcannes.com , http://www.inthemoodforcinema.com et http://www.inthemoodforluxe.com et pour ceux qui m’ont suivie sur twitter pendant le festival sur @moodforcannes, vous pouvez également me suivre toute l’année sur mon compte twitter principal et quotidien @moodforcinema .

    Ci-dessous en vidéos et en images, quelques autres de mes meilleurs moments en attendant de revenir en critiques sur mes coups de cœur de cette édition (« Amour », « A perdre la raison », « J’enrage de son absence », « Après la bataille », « Vous n’avez encore rien vu », « De rouille et d’os », « Dans la brume », « Reality »…).

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    Toutes les photos de cet article sont la propriété d’ http://inthemoodlemag.com . Les photos du jury sont celles de la conférence de presse du clôture du festival. Le menu est celui du dîner des 65 ans du Festival de Cannes.

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  • Bilan du 64ème Festival de Cannes et retour sur le palmarès de ce Festival de Cannes 2011

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    Par ce bilan, une semaine après la clôture de ce 64ème Festival de Cannes, je vais tenter de répondre à cette question qui revient chaque jour, et qui me replonge délicieusement mais avec nostalgie dans mes nombreux souvenirs, et à laquelle je ne peux bien souvent répondre par autre chose que par un large sourire énigmatique ou un galimatias extatique tant ce festival a brassé d’émotions bien souvent ineffables : comment était cette édition 2011 du Festival de Cannes ?  Pas encore tout à fait dégrisée de cinéma, d’illusions, de légèreté, d’esquisses de rêves impossibles, de cette euphorie étrange et jouissive provoquée par ce mélange subtil de cinéma et de vie qui y ressemble là-bas plus qu’ailleurs et qui vous fait oublier la fatigue et le temps qui passe et que cela ne peut durer toujours et qu’il existe un ailleurs où tout ne tourne pas autour du cinéma,  je vais tenter de faire le tri dans mes souvenirs encore joyeusement embrumés.  Sans doute, de loin, le festival ne dure-t-il que onze petits jours mais vécu de l’intérieur l’intensité de chaque journée en fait un tour du monde émotionnel qu’il est bien difficile de retranscrire avec justesse une fois revenue chez soi et à ce que certains appellent réalité (une notion que je revendique de n’appréhender encore pas très bien).

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    Comment répondre quand tant d’images, de couleurs, de sensations, de musiques, de visages défilent dans mes souvenirs  dont, pour un certain nombre, je me demande s’ils étaient réels ou le fruit de mon imagination  débordante qui, telle celle du héros de Woody Allen, dans « Minuit à Paris », me ferait confondre la réalité et mon « âge d’or »? C’est comme ça que cela a commencé pourtant : par une déclaration d’amour à Paris, au pouvoir de l’illusion, de l’imagination,  à la magie de Paris et du cinéma qui permet de croire à tout, même qu’il est possible au passé et au présent de se rencontrer et s’étreindre, une déclaration d’amour au cinéma  évasion salutaire  «  dans une époque bruyante et compliquée ». Cela a commencé par Mélanie Laurent qui déclarait « Cannes, c’est magique », malgré tout ce qui n’y est pas aussi à Cannes et que, cette année, sans doute ensorcelée par Woody Allen, je n’ai pas vu ou en tout cas ai préféré ignorer : les blasés, ha-ra-ssés, cyniques, las, étrangement amnésiques, et les acharnés à paraître tout cela à la fois. Cela a commencé par la voix entraînante de Jamie Cullum chantant un « New York » qui n’a cessé de m’accompagner, refrain joyeux et teinté d’une douce mélancolie entendu comme une litanie du vip room à la Terrazza Martini, du club Albane au patio Canal + où, au choix, les soirées se terminaient dans un étourdissant tumulte. Oui, une douce mélancolie.  Comme un signe prémonitoire puisque c’est le titre du film de ce festival qui m’a sans doute le plus marquée : « Melancholia », sans doute victime au palmarès des déclarations désastreuses de son réalisateur, après avoir été exclu du festival quelques jours avant la clôture afin que l’œuvre soit dissociée du cinéaste.

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     Mais aurait-il été possible de lui attribuer la palme d’or sans entacher l’image du festival ? Il l’aurait pourtant, à mon sens, beaucoup plus méritée que « The Tree of life », le vertige mystique et  poème hypnotique de Terrence Malick à la réalisation  certes d’une virtuosité époustouflante,  aussi fascinant,  audacieux, ambitieux qu’agaçant, qui a aussi le mérite de nous rappeler que le cinéma n’est jamais aussi beau que lorsqu’il est un art insaisissable et non un produit de consommation cadenassé, une expérience cinématographique qui sonde le cosmos avec lyrisme pour appréhender la douleur intolérable de la perte d’un enfant et la vanité, l’absurdité, la brièveté de l’existence.

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    Mais comment aurais-je pu ne pas être envoûtée par le film de Lars Von Trier, aux accents viscontiens (« Le Guépard » et « Ludwig » ne racontant finalement pas autre chose que la déliquescence d’un monde et d’une certaine manière la fin du monde) étant inconditionnelle du cinéaste italien en question ? Dès la séquence d’ouverture (une succession de séquences et photos sur la musique de Wagner mêlant les images de Justine –Kirsten Dunst et les images de la collision cosmique), j’ai été éblouie, subjuguée. Après cette séquence éblouissante, Lars von Trier nous emmène dans un château en Suède, cadre à la fois familier et intemporel, contemporain et anachronique, lieu du mariage de Justine, hermétique au bonheur. La première partie lui est consacrée tandis que la seconde est consacrée à sa sœur Claire (Charlotte Gainsbourg). La première est aussi mal à l’aise avec l’existence que la seconde semble la maitriser jusqu’à ce que la menaçante planète « Melancholia » n’inverse les rôles, cette planète miroir allégorique des tourments de Justine provoquant chez tous cette peur qui l’étreint constamment, et la rassurant quand elle effraie les autres pour qui, jusque là, sa propre mélancolie était incompréhensible. Melancholia, c’est aussi le titre d’un poème de Théophile Gautier et d’un autre de Victor Hugo (extrait des « Contemplations ») et le titre que Sartre voulait initialement donner à « La nausée », en référence à une gravure de Dürer dont c’est également le titre. Le film de Lars von Trier est la transposition visuelle de tout cela, ce romantisme désenchanté et cruel. C’est aussi  un poème vertigineux, une peinture éblouissante, un opéra tragiquement romantique, bref une œuvre d’art à part entière. Un tableau cruel d’un monde qui se meurt ( dont la première partie fait penser à « Festen » de Vinterberg) dans lequel rien n’échappe au regard acéré du cinéaste : ni la lâcheté, ni la misanthropie, et encore moins la tristesse incurable, la solitude glaçante face à cette « Mélancholia », planète vorace et assassine, comme l’est la mélancolie dévorante de Justine. Lars von Trier parvient de surcroît à instaurer un véritable suspense qui s’achève par une scène redoutablement tragique d’une beauté saisissante aussi sombre que poignante et captivante qui, à elle seule, aurait justifié une palme d’or. Un film inclassable, qui mêle les genres, à contre-courant, à la fois pessimiste et éblouissant, l’histoire d’une héroïne  incapable d’être heureuse dans une époque qui galvaude cet état précieux et rare avec cette expression exaspérante « que du bonheur ». Le jury en a d’ailleurs semble-t-il débattu. Ainsi, selon Olivier Assayas, lors de la conférence de presse du jury : « En ce qui me concerne, c’est un de ses meilleurs films. Je pense que c’est un grand film. Je pense que nous sommes tous d’’accord pour condamner ce qui a été dit dans la conférence de presse. C’est une œuvre d’art accomplie. » Kirsten Dunst incarne la mélancolie à la perfection dans un rôle écrit au départ pour Penelope Cruz. Lui attribuer le prix d’interprétation féminine était sans doute une manière judicieuse pour le jury de récompenser le film sans l’associer directement au cinéaste et à ses propos, lequel cinéaste permet pour la troisième fois à une de ses comédiennes d’obtenir le prix d’interprétation cannois.

    Quel casse-tête d’ailleurs que ce palmarès sans doute pour le jury qui, certainement, a dû répondre à cette question : qu’est-ce qu’une œuvre de cinéma ? Evidemment pas forcément le film le plus évident, le plus accessible. Au contraire, peut-être le plus impalpable ? Et à celle-ci : qu’est-ce qu’une palme d’or ? Un film avec une portée sociale, politique, philosophique ? Un film intemporel ? Un film qui exprime une idée ou une situation complexe avec simplicité ? Un film à la réalisation complexe qui exprime une idée simple ? Un film qui échappe à toute catégorisation ? Un film qui porte l’art cinématographique et chacune de ses composantes à son paroxysme ? Un film qui nous transporte, nous éblouit, nous émeut ? Un film qui nous questionne ? Un film qui nous apporte des réponses ? Comment comparer « The Artist » à « The tree of life », « Michael » à « Habemus Papam » ? Comment décider que l’un mérité la récompense suprême et non l’autre ?

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    Lors de la conférence de presse du jury Robert de Niro a ainsi expliqué le choix du jury pour la palme d’or décernée à « The Tree of life » : « La plupart d’entre nous avons senti que c’était LE film, que cela avait  la grandeur, l’ampleur, l’importance, l’impact, les intentions qui semblaient correspondre à la palme d’or ». Le jury se démarque ainsi des palmes plus politiques ou sociales de ces dernières années, avec un palmarès équilibré et éclectique (peut-être aussi plus consensuel) à l’image de l’édition 2011 qui,  cette année, a réuni tous les genres, tous les styles, tous les tons faisant de cette sélection cannoise 2011 une radiographie magistrale de la diversité, de l’inventivité du cinéma mondial (et par ailleurs de la vitalité du cinéma français). Un cinéma qui s’est beaucoup intéressé à l’enfance meurtrie, au corps malmené, à l’infiniment grand et à l’infiniment petit, à la politique, mais qui, d’une manière ou d’une autre, a fait surgir la « grâce », l’espoir ou la générosité. Une sélection avec un record de films teintés de comédie après une sélection 2010 dont l’âpreté reflétait celle de la crise.

    Difficile sans doute pour le jury de ne pas primer « The Artist » de Michel Hazanavicus, film muet en noir et blanc, si différent des films habituellement primés à Cannes, passé à la dernière minute de hors compétition à la compétition. D’autant plus difficile de ne pas primer ce film qu’il s’agit un hommage au cinéma, à sa magie étincelante, à son histoire, mais aussi et avant tout aux artistes, à leur orgueil doublé de solitude, parfois destructrice…et donc d’une certaine manière à Cannes. Film éblouissant, réjouissant, émouvant qui convoque de nombreux souvenirs de cinéma. Déclaration d’amour au cinéma qui ressemble à tant de films du passé et à aucun autre film contemporain dont la réalisation est étonnamment inspirée (dans les deux sens du terme d’ailleurs puisque, en conférence de presse, Michel Hazanavicius a revendiqué son inspiration et même avoir « volé » certains cinéastes). Film burlesque, inventif, malin et touchant. Parce que l’émotion n’est pas ce qui prime pour une palme d’or (mais qu’est-ce qui prime pour une œuvre, vaste question…), le jury a choisi de récompenser l’acteur qui l’incarne,  cet « artiste » auquel le film est un hommage.  Une récompense méritée et qui consacre une carrière construite pas-à-pas et qui n’en est sans doute qu’à ses débuts (on évoque maintenant une sélection aux prochains Oscars.  Allez, je prends d’ores et déjà le pari non seulement d’une sélection mais aussi d’un Oscar à la clé ).

    Sans doute le choix pour le jury du prix d’interprétation masculine a-t-il été cornélien, Sean Penn métamorphosé, transfiguré dans le film de Paolo Sorrentino, "This must be the place", étant réellement exceptionnel ! Robert De Niro a ainsi déclaré lors de la conférence de presse du jury : «« J’ai beaucoup aimé le film de Sorrentino, je pense que Sean Penn est exceptionnel dans ce film ».    Le film de Sorrentino est ainsi le grand absent de ce palmarès même s’il a reçu le prix du jury œcuménique. Beaucoup de spectateurs ont été décontenancés par le mélange de genres dans l’histoire de ce chanteur de rock déchu, à la fois pathétique, touchant, ridicule, flamboyant, décalé, qui dans la deuxième partie part à la recherche d’un ancien tortionnaire nazi puis qui se transforme en  parcours initiatique. La photographie ( qui fait penser aux peintures de Hopper), l’interprétation, la bande originale, le ton faisaient de ce film un de mes coups de cœur de cette édition 2011 et un prétendant idéal au prix du jury attribué à « Polisse » , le bel hommage de Maïwenn aux policiers de la BPM, à leur dévorant métier et leur dévouement,  un constat effroyable sur la noirceur humaine dont la fin est bouleversante de beauté tragique, ces deux corps qui s’élancent, et font éclater ou taire la vérité, inadmissible, naitre l’espoir ou mourir de désespoir. Un film agaçant, intense, marquant, bouleversant, parfois même (sombrement) drôle.

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    Si de nombreux habitués étaient en sélection cette année : Moretti, Bilge Ceylan, Almodovar, les Dardenne, Kaurismaki… ils ont une nouvelle fois réussi à me surprendre. Almodovar avec son film le plus sombre, le plus inquiétant, horriblement fascinant, au scénario et à la mise en scène ciselés au scalpel, incroyablement maîtrisé, qui lui aussi mélange les genres avec une habileté déconcertante, se renouvèle sans renier ses thématiques habituelles. Les Dardenne, couronnés du Grand prix pour leur « Gamin au vélo » au contraire avec leur film visuellement le plus lumineux, aussi le plus populaire (pas mon préféré mais où leur direction d’acteur est une nouvelle fois remarquable), un film enragé, énergique, puissant, tendre et lucide  qui a la force et  la beauté sombre d’un concerto de Beethoven et une puissance, une émotion indéniables et qui n’enlèvent rien à la pudeur caractéristique du cinéma des Dardenne qui ont peut-être frôlé une troisième palme d’or…

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    Autre oublié du palmarès : « Michael » le premier film de Markus Schleinzer sur « les cinq derniers mois de la vie commune forcée d’un garçon de dix ans avec un homme de 35 ans », et qui dresse de cet homme un portrait affreusement normal, effroyablement quelconque, mais surtout sans aucun sensationnalisme, et qui aurait mérité là aussi un prix du jury. Un film fortement influencé par le cinéma de Haneke avec qui il a longtemps travaillé. Souhaitons-lui le même parcours…

    Oublié également le  film de Moretti, "Habemus papam", qui aurait mérité un prix du scénario, mon fou rire du festival,  dont Robert de Niro  a dit en conférence de presse : « Michel Piccoli est remarquable, Nani Moretti est exceptionnel. Tout est exceptionnel. Encore une fois nos décisions ont été difficiles à prendre. Il faut bien faire des choix, cela n’enlève rien aux films qui n’ont pas eu de prix. »

    Je ne me prononcerai pas sur le prix de la mise en scène attribué à Nicolas Winding  Refn pour « Drive » ni sur le grand prix ex-æquo reçu par  Nuri Bilge Ceylan n’ayant vu ni l’un ni l’autre… même si j’aurais préféré que le prix de la mise en scène soit dévolu à Almodovar qui, cette année encore, passera à côté de la palme d’or, et même du palmarès après son sublime « Etreintes brisées » il y a deux ans qui, déjà, n’avait rien obtenu.

    Le prix du scénario est revenu à la comédie maligne de Joseph Cedar « Footnote », un prix justifié pour une comédie israélienne ET universelle.

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    Dans les autres sélections, j’aurais eu deux coups de cœur : le premier c’est  «La guerre est déclarée » de Valérie Donzelli, projeté en ouverture de la Semaine de la Critique. Une déclaration de guerre mais surtout d’amour. Un hymne à la vie, au courage, à la fugacité du bonheur, un film plein de douce fantaisie, avec une inspiration toujours très truffaldienne, et jamais mièvre.  Mon autre coup de cœur dans les sections parallèles, c’est « Elena »   (qui a reçu le prix spécial du jury Un Certain Regard), troisième long-métrage d’Andreï Zvianguintsev après « Le Retour » et « Le Bannissement », un film à la fois glacial, beau et cruel.

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    J’aurais vu moins de films sans doute cette année, mais dégusté  chacun d’entre eux et chaque moment de ces 11 jours palpitants et pas seulement dans les salles de cinéma.   De ce festival qui a tenu ses belles promesses, je retiendrai : un petit-déjeuner sur le toit du palais des festivals accueillis par un Thierry Frémaux toujours aussi enthousiaste, de magnifiques rencontres, l’énergie électrique de Keziah Jones, la musique envoûtante de Craig Armstrong, l’envie viscérale d’écrire qui l’emporte toujours, la frustration de ne pas en avoir toujours eu le temps,  les étranges étreintes entre passé et présent (pas seulement dans le film de Woody Allen), le redoutable silence après la frénésie, des discussions à refaire le monde-souvent celui du cinéma- à n’en plus finir à des heures indues et dans des lieux improbables, des soirées sur la plage et notamment à se souvenir des belles choses, des ombres parallèles et toujours mystérieuses, une actualité qui dépassait la fiction , des conférences de presse passionnantes, des amitiés (parfois étrangement) indéfectibles, un bouleversant hommage à Jean-Paul Belmondo et une dernière soirée qui  s’est achevée dans un restaurant à la table à côté de celle de Kirsten Dunst, évadée du film et du dîner de clôture, la réalité rejoignant une dernière fois la fiction, une dernière soirée à se dire si seulement la vie pouvait être toujours ce vertige étourdissant, et  à rêver qu’elle puisse l’être. Et puis des images de cinéma, tant d’images de cinéma à l’aimer plus que jamais à la folie…qu’elles soient en couleur ou en noir et blanc, étourdissantes, fascinantes, terrifiantes, lumineuses, réalistes, poignantes, poétiques comme elles l’ont été tour à tour dans les films de cette édition 2011 qui resteront gravées dans ma mémoire, même un peu endolorie par un tel festival visuel, se mêlant à celles de mon étrange réalité.

     Merci à France 3 pour sa mise en avant dans le documentaire « Cannes à l’envers » diffusé le soir de la clôture, à  France info pour l’interview,  à 20 minutes et à Orange pour la reprise de mes articles et vous pouvez encore me retrouver dans le documentaire « Tous critiques ? » (réalisé à l’occasion des 50 ans de la Semaine de la Critique) le 5 juin à 14H30 et le 11 juin à 19H45 sur ciné cinéma club.  Merci à la Terrazza Martini,  au restaurant de la plage Gray d’Albion, à ADR prod et au palais des festivals pour ce sympathique petit-déjeuner sur le toit du monde du cinéma.

    Nous ne connaissons exceptionnellement pas encore les dates du Festival de Cannes 2012 (vraisemblablement à cause des élections) mais vous pourrez bien entendu les retrouver ici dès que ce sera le cas, ainsi que toutes les informations sur le Festival de Cannes 2012, et bientôt de nouvelles critiques de cette édition 2011. Je vous donne également rendez-vous sur In the mood for cinema pour de prochaines pérégrinations festivalières (Paris Cinéma et peut-être Cabourg, mais aussi Dinard et le Festival de Cinéma des Antipodes) et évidemment, comme chaque année, sur  In the mood for Deauville pour le Festival du Cinéma Américain de Deauville au sujet duquel vous pourrez bientôt retrouver de nombreuses informations sur mes différents blogs. Pour ceux qui m’ont suivie en direct sur twitter, retrouvez-moi sur mon autre compte quotidien (@moodforcinema) mais aussi sur mon compte consacré à Deauville (@moodfdeauville ).

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    Catégories : CLÔTURE (cérémonies/films), EDITORIAUX, PALMARES Lien permanent 0 commentaire Pin it! Imprimer
  • Bilan du Festival de Cannes 2011

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    Par ce bilan, quelques instants après la clôture de ce 64ème Festival de Cannes, je vais tenter de répondre à cette question qui revient chaque jour, et qui me replonge délicieusement mais avec nostalgie dans mes nombreux souvenirs, et à laquelle je ne peux bien souvent répondre par autre chose que par un large sourire énigmatique ou un galimatias extatique tant ce festival a brassé d’émotions bien souvent ineffables : comment était cette édition 2011 du Festival de Cannes ?  Pas encore tout à fait dégrisée de cinéma, d’illusions, de légèreté, d’esquisses de rêves impossibles, de cette euphorie étrange et jouissive provoquée par ce mélange subtil de cinéma et de vie qui y ressemble là-bas plus qu’ailleurs et qui vous fait oublier la fatigue et le temps qui passe et que cela ne peut durer toujours et qu’il existe un ailleurs où tout ne tourne pas autour du cinéma,  je vais tenter de faire le tri dans mes souvenirs encore joyeusement embrumés.  Sans doute, de loin, le festival ne dure-t-il que onze petits jours mais vécu de l’intérieur l’intensité de chaque journée en fait un tour du monde émotionnel qu’il est bien difficile de retranscrire avec justesse une fois revenue chez soi et à ce que certains appellent réalité (une notion que je revendique de n’appréhender encore pas très bien).

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    Comment répondre quand tant d’images, de couleurs, de sensations, de musiques, de visages défilent dans mes souvenirs  dont, pour un certain nombre, je me demande s’ils étaient réels ou le fruit de mon imagination  débordante qui, telle celle du héros de Woody Allen, dans « Minuit à Paris », me ferait confondre la réalité et mon « âge d’or »? C’est comme ça que cela a commencé pourtant : par une déclaration d’amour à Paris, au pouvoir de l’illusion, de l’imagination,  à la magie de Paris et du cinéma qui permet de croire à tout, même qu’il est possible au passé et au présent de se rencontrer et s’étreindre, une déclaration d’amour au cinéma  évasion salutaire  «  dans une époque bruyante et compliquée ». Cela a commencé par Mélanie Laurent qui déclarait « Cannes, c’est magique », malgré tout ce qui n’y est pas aussi à Cannes et que, cette année, sans doute ensorcelée par Woody Allen, je n’ai pas vu ou en tout cas ai préféré ignorer : les blasés, ha-ra-ssés, cyniques, las, étrangement amnésiques, et les acharnés à paraître tout cela à la fois. Cela a commencé par la voix entraînante de Jamie Cullum chantant un « New York » qui n’a cessé de m’accompagner, refrain joyeux et teinté d’une douce mélancolie entendu comme une litanie du vip room à la Terrazza Martini, du club Albane au patio Canal + où, au choix, les soirées se terminaient dans un étourdissant tumulte. Oui, une douce mélancolie.  Comme un signe prémonitoire puisque c’est le titre du film de ce festival qui m’a sans doute le plus marquée : « Melancholia », sans doute victime au palmarès des déclarations désastreuses de son réalisateur, après avoir été exclu du festival quelques jours avant la clôture afin que l’œuvre soit dissociée du cinéaste.

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     Mais aurait-il été possible de lui attribuer la palme d’or sans entacher l’image du festival ? Il l’aurait pourtant, à mon sens, beaucoup plus méritée que « The Tree of life », le vertige mystique et  poème hypnotique de Terrence Malick à la réalisation  certes d’une virtuosité époustouflante,  aussi fascinant,  audacieux, ambitieux qu’agaçant, qui a aussi le mérite de nous rappeler que le cinéma n’est jamais aussi beau que lorsqu’il est un art insaisissable et non un produit de consommation cadenassé, une expérience cinématographique qui sonde le cosmos avec lyrisme pour appréhender la douleur intolérable de la perte d’un enfant et la vanité, l’absurdité, la brièveté de l’existence.

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    Mais comment aurais-je pu ne pas être envoûtée par le film de Lars Von Trier, aux accents viscontiens (« Le Guépard » et « Ludwig » ne racontant finalement pas autre chose que la déliquescence d’un monde et d’une certaine manière la fin du monde) étant inconditionnelle du cinéaste italien en question ? Dès la séquence d’ouverture (une succession de séquences et photos sur la musique de Wagner mêlant les images de Justine –Kirsten Dunst et les images de la collision cosmique), j’ai été éblouie, subjuguée. Après cette séquence éblouissante, Lars von Trier nous emmène dans un château en Suède, cadre à la fois familier et intemporel, contemporain et anachronique, lieu du mariage de Justine, hermétique au bonheur. La première partie lui est consacrée tandis que la seconde est consacrée à sa sœur Claire (Charlotte Gainsbourg). La première est aussi mal à l’aise avec l’existence que la seconde semble la maitriser jusqu’à ce que la menaçante planète « Melancholia » n’inverse les rôles, cette planète miroir allégorique des tourments de Justine provoquant chez tous cette peur qui l’étreint constamment, et la rassurant quand elle effraie les autres pour qui, jusque là, sa propre mélancolie était incompréhensible. Melancholia, c’est aussi le titre d’un poème de Théophile Gautier et d’un autre de Victor Hugo (extrait des « Contemplations ») et le titre que Sartre voulait initialement donner à « La nausée », en référence à une gravure de Dürer dont c’est également le titre. Le film de Lars von Trier est la transposition visuelle de tout cela, ce romantisme désenchanté et cruel. C’est aussi  un poème vertigineux, une peinture éblouissante, un opéra tragiquement romantique, bref une œuvre d’art à part entière. Un tableau cruel d’un monde qui se meurt ( dont la première partie fait penser à « Festen » de Vinterberg) dans lequel rien n’échappe au regard acéré du cinéaste : ni la lâcheté, ni la misanthropie, et encore moins la tristesse incurable, la solitude glaçante face à cette « Mélancholia », planète vorace et assassine, comme l’est la mélancolie dévorante de Justine. Lars von Trier parvient de surcroît à instaurer un véritable suspense qui s’achève par une scène redoutablement tragique d’une beauté saisissante aussi sombre que poignante et captivante qui, à elle seule, aurait justifié une palme d’or. Un film inclassable, qui mêle les genres, à contre-courant, à la fois pessimiste et éblouissant, l’histoire d’une héroïne  incapable d’être heureuse dans une époque qui galvaude cet état précieux et rare avec cette expression exaspérante « que du bonheur ». Le jury en a d’ailleurs semble-t-il débattu. Ainsi, selon Olivier Assayas, lors de la conférence de presse du jury : « En ce qui me concerne, c’est un de ses meilleurs films. Je pense que c’est un grand film. Je pense que nous sommes tous d’’accord pour condamner ce qui a été dit dans la conférence de presse. C’est une œuvre d’art accomplie. » Kirsten Dunst incarne la mélancolie à la perfection dans un rôle écrit au départ pour Penelope Cruz. Lui attribuer le prix d’interprétation féminine était sans doute une manière judicieuse pour le jury de récompenser le film sans l’associer directement au cinéaste et à ses propos, lequel cinéaste permet pour la troisième fois à une de ses comédiennes d’obtenir le prix d’interprétation cannois.

    Quel casse-tête d’ailleurs que ce palmarès sans doute pour le jury qui, certainement, a dû répondre à cette question : qu’est-ce qu’une œuvre de cinéma ? Evidemment pas forcément le film le plus évident, le plus accessible. Au contraire, peut-être le plus impalpable ? Et à celle-ci : qu’est-ce qu’une palme d’or ? Un film avec une portée sociale, politique, philosophique ? Un film intemporel ? Un film qui exprime une idée ou une situation complexe avec simplicité ? Un film à la réalisation complexe qui exprime une idée simple ? Un film qui échappe à toute catégorisation ? Un film qui porte l’art cinématographique et chacune de ses composantes à son paroxysme ? Un film qui nous transporte, nous éblouit, nous émeut ? Un film qui nous questionne ? Un film qui nous apporte des réponses ? Comment comparer « The Artist » à « The tree of life », « Michael » à « Habemus Papam » ? Comment décider que l’un mérité la récompense suprême et non l’autre ?

    Lors de la conférence de presse du jury Robert de Niro a ainsi expliqué le choix du jury pour la palme d’or décernée à « The Tree of life » : « La plupart d’entre nous avons senti que c’était LE film, que cela avait  la grandeur, l’ampleur, l’importance, l’impact, les intentions qui semblaient correspondre à la palme d’or ». Le jury se démarque ainsi des palmes plus politiques ou sociales de ces dernières années, avec un palmarès équilibré et éclectique (peut-être aussi plus consensuel) à l’image de l’édition 2011 qui,  cette année, a réuni tous les genres, tous les styles, tous les tons faisant de cette sélection cannoise 2011 une radiographie magistrale de la diversité, de l’inventivité du cinéma mondial (et par ailleurs de la vitalité du cinéma français). Un cinéma qui s’est beaucoup intéressé à l’enfance meurtrie, au corps malmené, à l’infiniment grand et à l’infiniment petit, à la politique, mais qui, d’une manière ou d’une autre, a fait surgir la « grâce », l’espoir ou la générosité. Une sélection avec un record de films teintés de comédie après une sélection 2010 dont l’âpreté reflétait celle de la crise.

    Difficile sans doute pour le jury de ne pas primer « The Artist » de Michel Hazanavicus, film muet en noir et blanc, si différent des films habituellement primés à Cannes, passé à la dernière minute de hors compétition à la compétition. D’autant plus difficile de ne pas primer ce film qu’il s’agit un hommage au cinéma, à sa magie étincelante, à son histoire, mais aussi et avant tout aux artistes, à leur orgueil doublé de solitude, parfois destructrice…et donc d’une certaine manière à Cannes. Film éblouissant, réjouissant, émouvant qui convoque de nombreux souvenirs de cinéma. Déclaration d’amour au cinéma qui ressemble à tant de films du passé et à aucun autre film contemporain dont la réalisation est étonnamment inspirée (dans les deux sens du terme d’ailleurs puisque, en conférence de presse, Michel Hazanavicius a revendiqué son inspiration et même avoir « volé » certains cinéastes). Film burlesque, inventif, malin et touchant. Parce que l’émotion n’est pas ce qui prime pour une palme d’or (mais qu’est-ce qui prime pour une œuvre, vaste question…), le jury a choisi de récompenser l’acteur qui l’incarne,  cet « artiste » auquel le film est un hommage.  Une récompense méritée et qui consacre une carrière construite pas-à-pas et qui n’en est sans doute qu’à ses débuts (on évoque maintenant une sélection aux prochains Oscars.  Allez, je prends d’ores et déjà le pari non seulement d’une sélection mais aussi d’un Oscar à la clé ).

    Sans doute le choix pour le jury du prix d’interprétation masculine a-t-il été cornélien, Sean Penn métamorphosé, transfiguré dans le film de Paolo Sorrentino, "This must be the place", étant réellement exceptionnel ! Robert De Niro a ainsi déclaré lors de la conférence de presse du jury : «« J’ai beaucoup aimé le film de Sorrentino, je pense que Sean Penn est exceptionnel dans ce film ».    Le film de Sorrentino est ainsi le grand absent de ce palmarès même s’il a reçu le prix du jury œcuménique. Beaucoup de spectateurs ont été décontenancés par le mélange de genres dans l’histoire de ce chanteur de rock déchu, à la fois pathétique, touchant, ridicule, flamboyant, décalé, qui dans la deuxième partie part à la recherche d’un ancien tortionnaire nazi puis qui se transforme en  parcours initiatique. La photographie ( qui fait penser aux peintures de Hopper), l’interprétation, la bande originale, le ton faisaient de ce film un de mes coups de cœur de cette édition 2011 et un prétendant idéal au prix du jury attribué à « Polisse » , le bel hommage de Maïwenn aux policiers de la BPM, à leur dévorant métier et leur dévouement,  un constat effroyable sur la noirceur humaine dont la fin est bouleversante de beauté tragique, ces deux corps qui s’élancent, et font éclater ou taire la vérité, inadmissible, naitre l’espoir ou mourir de désespoir. Un film agaçant, intense, marquant, bouleversant, parfois même (sombrement) drôle.

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    Si de nombreux habitués étaient en sélection cette année : Moretti, Bilge Ceylan, Almodovar, les Dardenne, Kaurismaki… ils ont une nouvelle fois réussi à me surprendre. Almodovar avec son film le plus sombre, le plus inquiétant, horriblement fascinant, au scénario et à la mise en scène ciselés au scalpel, incroyablement maîtrisé, qui lui aussi mélange les genres avec une habileté déconcertante, se renouvèle sans renier ses thématiques habituelles. Les Dardenne, couronnés du Grand prix pour leur « Gamin au vélo » au contraire avec leur film visuellement le plus lumineux, aussi le plus populaire (pas mon préféré mais où leur direction d’acteur est une nouvelle fois remarquable), un film enragé, énergique, puissant, tendre et lucide  qui a la force et  la beauté sombre d’un concerto de Beethoven et une puissance, une émotion indéniables et qui n’enlèvent rien à la pudeur caractéristique du cinéma des Dardenne qui ont peut-être frôlé une troisième palme d’or…

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    Autre oublié du palmarès : « Michael » le premier film de Markus Schleinzer sur « les cinq derniers mois de la vie commune forcée d’un garçon de dix ans avec un homme de 35 ans », et qui dresse de cet homme un portrait affreusement normal, effroyablement quelconque, mais surtout sans aucun sensationnalisme, et qui aurait mérité là aussi un prix du jury. Un film fortement influencé par le cinéma de Haneke avec qui il a longtemps travaillé. Souhaitons-lui le même parcours…

    Oublié également le  film de Moretti, "Habemus papam", qui aurait mérité un prix du scénario, mon fou rire du festival,  dont Robert de Niro  a dit en conférence de presse : « Michel Piccoli est remarquable, Nani Moretti est exceptionnel. Tout est exceptionnel. Encore une fois nos décisions ont été difficiles à prendre. Il faut bien faire des choix, cela n’enlève rien aux films qui n’ont pas eu de prix. »

    Je ne me prononcerai pas sur le prix de la mise en scène attribué à Nicolas Winding  Refn pour « Drive » ni sur le grand prix ex-æquo reçu par  Nuri Bilge Ceylan n’ayant vu ni l’un ni l’autre… même si j’aurais préféré que le prix de la mise en scène soit dévolu à Almodovar qui, cette année encore, passera à côté de la palme d’or, et même du palmarès après son sublime « Etreintes brisées » il y a deux ans qui, déjà, n’avait rien obtenu.

    Le prix du scénario est revenu à la comédie maligne de Joseph Cedar « Footnote », un prix justifié pour une comédie israélienne ET universelle.

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    Dans les autres sélections, j’aurais eu deux coups de cœur : le premier c’est  «La guerre est déclarée » de Valérie Donzelli, projeté en ouverture de la Semaine de la Critique. Une déclaration de guerre mais surtout d’amour. Un hymne à la vie, au courage, à la fugacité du bonheur, un film plein de douce fantaisie, avec une inspiration toujours très truffaldienne, et jamais mièvre.  Mon autre coup de cœur dans les sections parallèles, c’est « Elena »   (qui a reçu le prix spécial du jury Un Certain Regard), troisième long-métrage d’Andreï Zvianguintsev après « Le Retour » et « Le Bannissement », un film à la fois glacial, beau et cruel.

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    J’aurais vu moins de films sans doute cette année, mais dégusté  chacun d’entre eux et chaque moment de ces 11 jours palpitants et pas seulement dans les salles de cinéma.   De ce festival qui a tenu ses belles promesses, je retiendrai : un petit-déjeuner sur le toit du palais des festivals accueillis par un Thierry Frémaux toujours aussi enthousiaste, de magnifiques rencontres, l’énergie électrique de Keziah Jones, la musique envoûtante de Craig Armstrong, l’envie viscérale d’écrire qui l’emporte toujours, la frustration de ne pas en avoir toujours eu le temps,  les étranges étreintes entre passé et présent (pas seulement dans le film de Woody Allen), le redoutable silence après la frénésie, des discussions à refaire le monde-souvent celui du cinéma- à n’en plus finir à des heures indues et dans des lieux improbables, des soirées sur la plage et notamment à se souvenir des belles choses, des ombres parallèles et toujours mystérieuses, une actualité qui dépassait la fiction , des conférences de presse passionnantes, des amitiés (parfois étrangement) indéfectibles, un bouleversant hommage à Jean-Paul Belmondo et une dernière soirée qui  s’est achevée dans un restaurant à la table à côté de celle de Kirsten Dunst, évadée du film et du dîner de clôture, la réalité rejoignant une dernière fois la fiction, une dernière soirée à se dire si seulement la vie pouvait être toujours ce vertige étourdissant, et  à rêver qu’elle puisse l’être. Et puis des images de cinéma, tant d’images de cinéma à l’aimer plus que jamais à la folie…qu’elles soient en couleur ou en noir et blanc, étourdissantes, fascinantes, terrifiantes, lumineuses, réalistes, poignantes, poétiques comme elles l’ont été tour à tour dans les films de cette édition 2011 qui resteront gravées dans ma mémoire, même un peu endolorie par un tel festival visuel, se mêlant à celles de mon étrange réalité.

     

     Merci à France 3 pour sa mise en avant dans le documentaire « Cannes à l’envers » diffusé le soir de la clôture, à  France info pour l’interview,  à 20 minutes et à Orange pour la reprise de mes articles et vous pouvez encore me retrouver dans le documentaire « Tous critiques ? » (réalisé à l’occasion des 50 ans de la Semaine de la Critique) le 5 juin à 14H30 et le 11 juin à 19H45 sur ciné cinéma club.  Merci à la Terrazza Martini,  au restaurant de la plage Gray d’Albion, à ADR prod et au palais des festivals pour ce sympathique petit-déjeuner sur le toit du monde du cinéma.

    Nous ne connaissons exceptionnellement pas encore les dates du Festival de Cannes 2012 (vraisemblablement à cause des élections) mais vous pourrez bien entendu les retrouver ici dès que ce sera le cas, ainsi que toutes les informations sur le Festival de Cannes 2012, et bientôt de nouvelles critiques de cette édition 2011. Je vous donne également rendez-vous sur In the mood for cinema pour de prochaines pérégrinations festivalières (Paris Cinéma et peut-être Cabourg, mais aussi Dinard et le Festival de Cinéma des Antipodes) et évidemment, comme chaque année, sur  In the mood for Deauville pour le Festival du Cinéma Américain de Deauville au sujet duquel vous pourrez bientôt retrouver de nombreuses informations sur mes différents blogs. Pour ceux qui m’ont suivie en direct sur twitter, retrouvez-moi sur mon autre compte quotidien (@moodforcinema) mais aussi sur mon compte consacré à Deauville (@moodfdeauville ).

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  • Palmarès du Festival de Cannes 2011 et conférence de presse des lauréats

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    Dans quelques heures, il me faudra quitter Cannes et retrouver un semblant de réalité après ces 12 jours qui m'en ont tenue délicieusement éloignée. A partir de jeudi, vous pourrez retrouver ici mes très nombreuses et parfois contradictoires impressions sur mes péripéties "in the mood for Cannes 2011", mon décryptage de cette sélection 2011 et du palmarès  dont je peux néanmoins d'ores et déjà vous annoncer qu'ils m'ont l'un et l'autre particulièrement réjouie, cette sélection 2011 ayant été d'une qualité remarquable, et le palmarès en reflétant la diversité et la richesse. Mon seul regret: l'absence au palmarès de "This must be the place" de Paolo Sorrentino. Je reviendrai en détails sur chacun des films primés même si je vous ai parlé  brièvement de la plupart d'entre eux. Je ferai bien évidemment également une longue critique de la palme d'or. Les photos ci-dessus sont extraites de la conférence de presse des lauréats qui s'est déroulée à l'issue du palmarès et à laquelle j'ai eu la chance et le plaisir d'assister.

    LONGS METRAGES

     Palme d'Or

     THE TREE OF LIFE (L’Arbre de vie) réalisé par Terrence MALICK

    Grand Prix - EX-ÆQUO

    BIR ZAMANLAR ANADOLU’DA (Once Upon A Time In Anatolia) réalisé par Nuri Bilge CEYLAN

    LE GAMIN AU VÉLO (The Kid With A Bike) réalisé par Jean-Pierre et Luc DARDENNE

    Prix de la mise en scène

     Nicolas WINDING REFN pour DRIVE

    Prix du Jury

    POLISSE (Poliss) réalisé par MAÏWENN

    Prix d'interprétation masculine

     Jean DUJARDIN dans THE ARTIST réalisé par Michel HAZANAVICIUS

    Prix d'interprétation féminine

    Kirsten DUNST dans MELANCHOLIA réalisé par Lars von TRIER

    Prix du scénario 

    Joseph CEDAR pour HEARAT SHULAYIM (Footnote)

     COURTS METRAGES

    Palme d'Or

    CROSS (Cross-Country) réalisé par Maryna VRODA

    Prix du Jury

    BADPAKJE 46 (Maillot de bain 46 / Swimsuit 46) réalisé par Wannes DESTOOP

    UN CERTAIN REGARD

    Prix Un Certain Regard Ex-æquo

    ARIRANG de KIM Ki-Duk

    HALT AUF FREIER STRECKE (Arrêt en pleine voie) d’Andreas DRESEN

    Prix spécial du Jury

    ELENA d’Andrey ZVYAGINTSEV

    Prix de la mise en scène

    BÉ OMID É DIDAR (Au revoir) de Mohammad RASOULOF

     CAMERA D'OR

    LAS ACACIAS réalisé par Pablo GIORGELLI présenté dans le cadre de la Semaine de la Critique

    CINEFONDATION

    Premier Prix

     DER BRIEF (La Lettre) réalisé par Doroteya DROUMEVA

     Deuxième Prix

     DRARI réalisé par Kamal LAZRAQ

     Troisième Prix

     YA-GAN-BI-HANG (Fly by Night) réalisé par Son Tae-gyum

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  • Palmarès du Festival de Cannes 2011 : pronostics

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    C’est demain soir, déjà, à 19H15, dans le Grand Théâtre Lumière,  que sera délivré le palmarès de ce 64ème  Festival de Cannes après 11 jours dont je retiens une multitude d’émotions, réelles et cinématographiques, troublantes, indéfinissables, étourdissantes, grisantes qu’il me faudra sans doute plusieurs jours pour rationaliser et donc autant de temps avant que vous en trouviez le récit complet ici, afin également que je trie mes centaines de photos, dizaines de vidéos et milliers de souvenirs et afin de vous donner la juste (dé)mesure de ce que j’ai vécu pendant ces 11 jours particulièrement intenses. Je ferai également un bilan thématique de ce Festival 2011. Laisser le temps au temps sera d’ailleurs plus que jamais le parti pris de ce blog, qui se veut l’anti twitter, l’anti phrase lapidaire, avec pour objectif de privilégier de plus en plus la longueur et la qualité des articles à la fréquence.

    L’actualité, elle , n’attend pas et, quoiqu’il arrive , demain, le palmarès de cette édition 2011 sera délivré, une édition dont je peux vous dire qu’elle a entièrement tenu ses promesses, celle d’une sélection particulièrement diversifiée et de très haut niveau, moins sombre que d’habitude (même si certains films, et non des moindres, l’étaient particulièrement) et qui, plus que jamais, a célébré le cinéma, tous les cinémas, sans oublier d’être en phase avec l’actualité (même si celle-ci, cette année, était encore plus cinématographique et invraisemblable que les films projetés pendant le festival au point qu’elle les a même un peu éclipsés).

    Mais l’actualité était aussi à Cannes, avec les déclarations pathétiques (un euphémisme, évidemment) de Lars Van Trier qui lui a valu son éviction du festival, mais heureusement pas celle de son film dont je vous ai déjà parlé brièvement ici (et plus longuement bientôt) qui pour moi fait partie de ceux qui mériteraient la palme d’or. Même si le festival a eu l’excellente idée de dissocier l’œuvre du cinéaste de ses propos, le jury pourra-t-il primer la première sans donner l’impression de minimiser les propos de Lars von Trier ? Cela me parait difficile étant donné les résonances politiques du Festival de Cannes.  N’ayant vu que la moitié des films de la compétition mes pronostics seront bien évidemment tronqués mais les films m’ayant laissé les plus fortes impressions et qui, selon moi, mériteraient la palme d’or sont :

    -« Tree of life », le vertige sensoriel de Terrence Malick qui fait parfois surgir la grâce

    - « Melancholia » de Lars von Trier (habitué du palmarès, palme d’or en 2000 avec « Dancer in the dark »), allégorie éblouissante, audacieuse, pessimiste et cruelle sur la mélancolie d’une beauté, d’une cruauté, d’une lucidité remarquables.

    - « The Artist » de Michel Hazanavicius (un cinéaste au parcours et au style très différents des habituels « palmés »), film burlesque, inventif, humain, touchant, déclaration d’amour au cinéma, aux artistes, à leur orgueil et leur fragilité.

    - « This must be the place » de Paolo Sorrentino (qui avait reçu le prix du jury en 2008 pour « Il Divo »), déjà lauréat du prix œcuménique, petit bijou de sensibilité et d’humour noir à l’interprétation (bouleversant, singulier et méconnaissable Sean Penn), la BO et la mise en scène remarquables. Un des rares films à m’avoir profondément émue.

     « The Artist » serait sans doute le plus improbable pour une palme d’or, les jurys de ces dernières années ayant privilégié des films en résonance avec l’actualité, très différents de ce bel et atypique hommage au cinéma et aux artistes qui a réjoui les festivaliers.

    -Ajout du dimanche 22 mai après avoir vu "Habemus Papam" de Moretti en séance de rattrapage, un film irrésistible qui présente le Vatican comme une sorte de théâtre absurde avec le pape le plus humain qui ait (ou plutôt qui n'ait pas ) existé. Un sérieux prétendant au grand prix ou au prix du scénario selon moi (davantage qu'au prix d'interprétation, Piccolo ayant une rude concurrence dans cette catégorie et la force du film étant avant tout son scénario, et sa mise en scène, davantage que son interprétation).

    La critique internationale, avec le prix Fipresci, a choisi de récompenser la fable sociale de Kaurismäki (le jury œcuménique lui a également attribué une mention spéciale) qui, si elle dégage un charme indéniable, ne m’a pas émue, charmée, impressionnée comme les films précédemment cités. Ce film entre davantage dans la lignée des palmes à caractère « social »remises ces dernières années.

    « Le Gamin au vélo » des frères Dardenne a été unanimement bien accueilli par les festivaliers mais, à mon avis, ne devrait pas valoir une troisième palme d’or aux Dardenne, étant selon moi en-deçà de leurs précédents films, et certes plus « grand public ».

    Tilda Swinton revient souvent citée parmi les prétendantes au nom de meilleure actrice d’ailleurs moins nombreuses que les prétendants au titre de meilleur acteur (Sean Penn qui, une nouvelle fois,  m’a époustouflée,-pourra-t-il recevoir – à nouveau le prix d’interprétation ? Pourquoi pas Michel Piccoli dans le film de Morretti que j’essaierai de voir tout à l’heure ? Pourquoi pas Vincent Lindon ET Alain Cavalier pour leur travail d’improvisation ? ).

    Les prix ex-aquo ou collectifs sont également à la mode, pourquoi pas deux prix d’interprétation masculine pour deux films très différents : Sean Penn et l’acteur de « Michael » (Michael Fuith) ? Michel Piccoli et Jean Dujardin ? Alain Cavalier et Vincent Lindon donc (manière de récompenser aussi le travail du cinéaste et le parti pris de son film ?  Ou un acteur moins attendu au jeu délibérément théâtral : André Wilms (dans « Le Havre ») ?

    La sélection française a d’ailleurs déjà gagné à l’applaudimètre qu’il s’agisse de « Polisse », « Pater » (que j’ai malheureusement manqué), ou « The Artist » (dont je vous ai raconté l’accueil exceptionnel lors de la séance officielle).

    La maîtrise d’Almodovar dans ce film qui a déstabilisé ses inconditionnels, « La Piel que habito » mais qui n’en est pas moins aussi « horrible » que fascinant ne devrait pas être celui qui lui permettra enfin de décrocher cette palme d’or qu’il convoite toujours malgré ses nombreuses récompenses cannoises mais pourrait lui valoir un grand prix, un prix d’interprétation féminine pour Elena Anaya, ou masculine pour Antonio Banderas. Il mériterait en tout cas, encore une fois, une place au palmarès.

    Je verrais bien « Michael » recevoir le prix du jury ou de la caméra d’or, étonnant premier film, qui dissèque presque cliniquement la vie d’un pédophile, en parvenant avec beaucoup de talent, à ne jamais le rendre sympathique. Un film comme « Footnote », injustement méprisé par les festivaliers, pourrait également recevoir ce prix.

    « Polisse » est souvent cité comme susceptible de recevoir le Grand prix. Il pourrait également recevoir le prix scénario pour le travail réalisé en amont. Ou pourquoi pas « The Artist » pour  Le Grand prix  avec, comme palme d’or, un film plus âpre ou pessimiste, mettant ainsi en valeur la diversité du festival ? Pour ma part, comme pour « Polisse », je lui décernerais plutôt le prix du scénario.

    Je précise encore une fois que je n’ai vu que la moitié des films en compétition… d’où le caractère approximatif de ces pronostics et commentaires.

    Réponse demain soir pour savoir quel film aura choisi le jury de Robert De Niro comme successeur d’ « Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures »d’Apichatpong Weerasethakul.

    Voici les prix qui seront décernés demain soir (exception faîte d’éventuels prix spéciaux). Vous retrouverez bien entendu ici le palmarès détaillé dès demain soir et, mercredi ou jeudi, mon bilan détaillé de ce festival 2011, avec de nombreuses photos à l’appui.

    Palme d'Or

    Grand Prix

    Prix de la mise en scène

    Prix du Jury

    Prix d'interprétation masculine

    Prix d'interprétation féminine

    Prix du scénario

    COURTS METRAGES EN COMPETITION

    Palme d'Or

    Prix du Jury

    CAMERA D'OR

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  • Festival de Cannes 2011 : Lars von Trier, Almodovar en bref et la conférence de presse de « Pater » d’Alain Cavalier avec Vincent Lindon

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    Cette année, j’ai été plus avare d’articles que jamais, non pas parce que je n’avais rien à raconter mais, au contraire, parce que les évènements, projections, conférences de presse, soirées s’enchaînent sans que je puisse trouver le temps de vous les relater en m’y consacrant comme je le souhaiterais, également sans doute aussi parce que les émotions tumultueuses et contradictoires engendrées par ce festival annihilent le recul nécessaire pour écrire, ou peut-être aussi parce que cela les exacerbe, et que j’ai envie de trier ce que je peux vous raconter ou non, et que je n’ai surtout pas envie de  tomber dans la facilité des phrases lapidaires, finalement imprécises, peut-être aussi parce que, pour une fois, j’ai -un peu seulement- décidé de préférer la vie au cinéma (ou plutôt de la privilégier, non de la préférer) même si je continue à penser comme Truffaut que, le plus souvent, « Les films sont plus harmonieux que la vie » (mais recherchons-nous l’harmonie, vaste question que j’aurai encore moins le temps de développer ici), mais, rassurez-vous, tout est mémorisé et je vous raconterai tout la semaine suivant la fin du festival, du petit-déjeuner en présence de Thierry Frémaux, en passant par ma soirée dans les coulisses du Grand Journal, sans oublier l’essentiel : mes critiques de films mais aussi mes très nombreuses vidéos et photos que je n’ai pas eu le temps de mettre en ligne. Je vous parlerai également plus tard du film d’Almodovar vu hier, un film horriblement fascinant, avec une réalisation incroyablement maîtrisée (comme toujours chez Almodovar) et qui pourrait à nouveau lui valoir un prix (interprétation pour Banderas particulièrement inquiétant ? Un prix de la mis en scène ? Un prix du jury ?) mais sans doute pas la palme d’or qu’il n’a toujours pas réussi à obtenir malgré ses nombreuses sélections à Cannes  et ses nombreux prix.

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    Je vous parlerai également du film de cette édition 2011 qui m’a le plus marquée et dont j’espère qu’il ne sera pas éclipsé par les sinistres déclarations de son réalisateur Lars von Trier. « Melancholia » est ainsi de ces (rares) films qui vous scotchent à votre siège tant ce qui se déroule sur l’écran est une explosion  (implosion serait d’ailleurs peut-être plus juste)  d’une beauté, d’une cruauté, d’une lucidité remarquables. Au contraire de pas mal de festivaliers qui se sont ennuyés, j’ai été totalement captivée par cette allégorie éblouissante, audacieuse, pessimiste et cruelle sur la mélancolie (au sens clinique et non romantique du terme) dont le dernier plan à lui seul mériterait une récompense. Le festival a eu la judicieuse idée de séparer l’œuvre de son réalisateur pour reprendre les termes de Gilles Jacob et en demandant à Lars von  Trier de quitter Cannes, de permettre ainsi au film de rester en compétition. Il serait vraiment étonnant qu’il ne soit pas présent au palmarès à moins que les déclarations désastreuses de Lars von Trier ne dissuadent le jury de lui attribuer un prix. Je vous livrerai demain soir mes pronostics et mon bilan de cette compétition 2011. En attendant, retrouvez ci-dessous, mon résumé de la conférence de presse de « Pater » (LE film de cette compétition 2011 que je souhaite rattraper, espérons que ce sera possible dimanche).

    Conférence de presse de « Pater » d’Alain Cavalier avec Alain Cavalier, Vincent Lindon…

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    C’est une des bizarreries cannoises : alors que pour la conférence de presse de « Pirate des Caraïbes » il était impossible d’entrer (c’est le cas, la plupart du temps, des conférences de presse de films américains), pour celle de « Pater » et alors que je venais simplement attendre pour la conférence suivante (celle de « La Conquête » que je vous raconterai ultérieurement), et alors que celle de « Pater » était déjà commencé, on m’a fait entrer dans la salle ...car quasiment vide et c’est bien dommage car cette conférence était réellement passionnante, et n’a fait qu’accroître mon envie de découvrir le film d’Alain Cavalier. Vincent Lindon s’est révélé passionné, engagé même en parlant du film, mais aussi touchant, drôle, sincère, à fleur de peau.

    Vincent Lindon a notamment parlé d’économie du cinéma, un sujet qui le passionne, rappelant que la qualité d’une scène ou d’un film n’était pas affaire de budget prenant pour exemple la scène d’ « Itinéraire d’un enfant gâté » dont tout le monde se souvient, celle du face-à-face  entre Belmondo et Anconina dans une chambre de bonne et au cours de laquelle il lui apprend à ne pas être surpris, ou celle de Titanic « avec la buée sur la vitre », des films qui ont coûté très chers et dont les scènes les plus mémorables sont les moins coûteuses.

    Vincent Lindon a déclaré que c’était la première fois qu’il voyait le film sur grand écran : « Tous les gens attendaient un OVNI. On confond bizarre avec chiant » a-t-il dit.

    « On ne faisait qu’une prise et si elle ne fonctionnait pas, elle n’était pas dans le film ».

    Cavalier : « On prenait la caméra et on continuait une sorte de conversation. »

    Vincent Lindon a également révélé avoir été très touché par l’accueil dans le Grand Théâtre Lumière (le film le plus applaudi de cette sélection 2011 ) : « Cela faisait 25 ans que j’attendais ce moment, ce n’était pas un bon accueil mais un accueil incroyable. » « Je l’aurai en souvenir toute ma vie. » « On prenait la caméra et on continuait une sorte de conversation. »  « J’adore qu’on m’aime, j’adore qu’on aime ce que je fais quand j’aime autant ce que je fais. » Quant à Cavalier : « Le fait d’être aimé régulièrement dans la vie n’est pas mon problème. » Concernant les artistes, d’après Cavalier : « On ne s’aime pas tellement que ça et on s’abrite derrière ce qu’on fait. »

    Pour Cavalier, concernant les citations du film se rapprochant de citations réelles : « Je sais tout sur ceux qui ont le pouvoir mais c’est moi qui avais le pouvoir. Les citations étaient inconscientes. »

    Pour Vincent Lindon : « On passe son temps à vouloir plaire ou déplaire à son papa ou sa maman, toujours en réaction ».

    Pour lui ce film a changé son regard sur son métier : «  Je crois que, Alain, est en train de m’influencer sur une chose et une idée est en train de naitre » se déclarant las de tout ce qui précède habituellement le tournage (attente, maquillage, répétitions…), ce qui n’était pas le cas pour « Pater ». « Je pense que j’arrêterai ce métier plus tôt que prévu car je n’ai pas envie de devenir un vieil acteur. C’est ça qui a changé chez moi, je ne prends rien au sérieux, tout au tragique ».

    Sur ces paroles péremptoires et finalement très justes me rappelant la devise crétoise « tout est grave, rien n’est sérieux », je vous laisse pour partir vers de nouvelles aventures …un peu frustrée de ne pas avoir le temps de vous en raconter davantage…

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  • Mon bilan de l'année cinéma 2010

    Retrouvez mon bilan de l'année cinéma 2010 sur Inthemoodforcinema, en cliquant ici. Vous y trouverez mon bilan et top 2010, et mes projets et souhaits pour 2011.

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  • Palmarès complet du Festival de Cannes 2010 et images en direct de la clôture

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    Au préalable, je précise que mercredi ou jeudi, je reviendrai en détails sur ce festival et sur mes impressions aussi bien personnelles que cinématographiques. Je n'aurai pas trop de 4 jours pour faire le bilan et j'ai besoin de ce nécessaire recul pour appréhender ce festival si riche pour moi, en émotions et en rencontres et sur tout ce que m'inspirent ces 12 jours. Je vous parlerai également de « Biutiful » d'Inarritu vu hier matin, de « The Tree » de Julie Bertuccelli (le très beau film de clôture), de la conférence de presse de « La nostra vita » et bien sûr de la passionnante interview qu'a accepté de me donner Bernard Blancan avec l'assistance de touscoprod (je les remercie d'ores et déjà l'un et l'autre, il y a beaucoup d'autres personnes que j'aimerais remercier, j'y consacrerai donc également une note).

    Plus que jamais j'ai décidé de faire de ce blog l'antitwitter, de laisser le temps au temps, le temps aux mots de refléter avec le plus de justesse possible mes impressions, leur complexité, leurs nuances et ne pas céder à cette course vaine à l'information ou à la phrase la plus lapidaire, le plus souvent caricaturale et caricaturée.  De cela aussi je vous reparlerai. Je prendrai donc mon temps pour que mes mots soient aussi fidèles que possibles à ces émotions à la fois intenses et contradictoires, et à ce festival plus que jamais paradoxal.

    En attendant , voici mes premières impressions sur ce palmarès, un palmarès qui, à l'exception de la palme d'or, me réjouit, « équilibré » et « ouvert à tous les types de cinéma » comme l'a souligné Alexandre Desplat en conférence de presse et qui, comme je vous le prédisais hier, a mis le cinéma français à l'honneur avec le prix de la mise en scène pour « Tournée » de  Mathieu Amalric (un film « plein de vitalité » qui comme pour Tim Burton est « resté avec [moi] pendant tout le festival »), le grand prix pour « Des hommes et des Dieux » de Xavier Beauvois et le prix d'interprétation féminine pour Juliette Binoche dans « Copie conforme » d'Abbas Kiarostami,  dans lequel elle est sensuelle et lumineuse et dont le jeu est si riche et habité qu'il peut se prêter à plusieurs interprétations . Une Juliette Binoche  émouvante, éblouissante et bouleversante lors de la remise des prix. Un prix amplement mérité que j'avais d'ailleurs souhaité dans mon article consacré à ce très beau film. Dire que la sélection de ce film avait suscité une polémique, certains estimant que Juliette Binoche ne pouvait figurer à la fois sur l'affiche du festival et dans un film en compétition ! Le jury a eu l'intelligence de ne pas en tenir compte. Un palmarès à l'image de ce festival qui avant tout mis à l'honneur la diversité, la qualité et la richesse du cinéma français.

     Le jury a par ailleurs innové en décernant deux prix d'interprétation masculine, l'un pour Javier Bardem, sidérant dans « Biutiful » et l'autre pour Elio Germano dans « La nostra vita » réalisé par Daniele Luchetti.

    Pour le prix du scénario, le jury a choisi de récompenser « Poetry » du coréen Lee Chang-dong un film à la fois doux et âpre, sensible et violent.

    Pour la palme d'or, le jury  a fait le choix radical de l'insolite, du mysticisme, de l'étrangeté en primant le film « Oncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures » réalisé par Apichatpong Weerasethakul, un film qui ne remplira pas les salles dont le seul mérite est d'être la proposition elle aussi radicale d'un cinéaste, le témoignage d'un univers indéniablement singulier, ce qui ne l'empêche pas d'être rébarbatif... En conférence de presse le jury a justifié ce choix avec un peu d'embarras notamment par « sa façon de traiter un des plus grands mystères qui soit, la mort et ce qui se passe après la mort. » « son idée de l'éternité », « une expérience. »

    Si la palme d'or 2010 ne rejoint pas la catégorie des palmes politiques si nombreuses ces dernières années, cette cérémonie de clôture ne l'était pas moins avec ce « fauteuil  resté vide » comme l'a évoqué Kristine Scott Thomas, celui du cinéaste iranien Jafar Panahi qui devait faire partie du jury et qui, emprisonné en Iran, en est à son « 9ème jour de grève de la faim ». Juliette Binoche qui, en conférence de presse, avait cédé à l'émotion en apprenant cette nouvelle » a tenu entre ses mains le nom de Jafar Panahi et a également souhaiter évoquer ce « dur combat que d'être intellectuel » et ce « pays qui a besoin de nous ». L'Iran n'est d'ailleurs pas le seul pays dont la situation politique a été évoquée hier soir puisque  le comédien Elio Germano vivement applaudi a  dédié son  prix à « l'Italie et aux Italiens qui font tout ce qui est en leur pouvoir pour faire de l'Italie un pays meilleur malgré la classe dirigeante », l'Italie qui avait d'ailleurs boycotté le festival en raison du documentairede Sabina Guzzanti sur l'Aquila.

    Un festival qui plus que jamais a fait « écho aux bruits du monde » pour paraphraser Kristin Scott Thomas, un monde obscur, en quête de croyances, de mysticisme, de poésie aussi. Un monde qui communique plus et plus mal que jamais. Un monde qui cherche les clés de son Histoire récente ou plus ancienne pour appréhender son présent tourmenté.  Un monde dont la lueur d'espoir est bien souvent si fragile quand elle n'est pas totalement absente. Un monde « qui crie ». Un cri étouffé bien souvent. Un monde désarçonné qui se replie, recroqueville sur la cellule familiale.

    "The Tree" de Julie Bertuccelli, avec Charlotte Gainsbourg, Marton Csokas et Morgana Davies a été projeté à l'issue de la cérémonie. Je vous en parlerai ultérieurement.

    PALMARES COMPLET

    Palme d'Or

    LUNG BOONMEE RALUEK CHAT (Oncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures) réalisé par Apichatpong WEERASETHAKUL

    Grand Prix

    DES HOMMES ET DES DIEUX réalisé par Xavier BEAUVOIS

    Prix de la mise en scène 

    Mathieu AMALRIC pour TOURNÉE

    Prix du Jury

    UN HOMME QUI CRIE réalisé par Mahamat-Saleh HAROUN

    Prix d'interprétation masculine

    Javier BARDEM dans BIUTIFUL réalisé par Alejandro GONZÁLEZ IÑÁRRITU

    Elio GERMANO dans LA NOSTRA VITA réalisé par Daniele LUCHETTI

    Prix d'interprétation féminine

    Juliette BINOCHE dans COPIE CONFORME réalisé par Abbas KIAROSTAMI

    Prix du scénario

    LEE Chang-dong pour POETRY

    COURTS METRAGES EN COMPETITION

    Palme d'Or

    CHIENNE D'HISTOIRE réalisé par Serge AVÉDIKIAN

    Prix du Jury

    MICKY BADER (Micky se baigne) réalisé par Frida KEMPFF

    CAMERA D'OR

    AÑO BISIESTO réalisé par Michael ROWE présenté dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs

    UN CERTAIN REGARD

    Prix Un Certain Regard - Fondation Groupama Gan pour le Cinéma

    HAHAHA de HONG Sangsoo

    Prix du Jury

    OCTUBRE (Octobre) de Daniel VEGA & Diego VEGA

    Prix d'interprétation féminine Un Certain Regard

    Adela SANCHEZ , Eva BIANCO, Victoria RAPOSO pour LOS LABIOS (Les Lèvres) de Ivan FUND & Santiago LOZA

    CINEFONDATION

    Premier Prix de la Cinéfondation

    TAULUKAUPPIAAT (Les Marchands de tableaux) de Juho KUOSMANEN

    Deuxième Prix de la Cinéfondation

    COUCOU-LES-NUAGES de Vincent CARDONA

    Troisième Prix de la Cinéfondation ex-aequo

    HINKERORT ZORASUNE deVatche BOULGHOURJIAN

    JA VEC JESAM SVE ONO ŠTO ŽELIM DA IMAM de Dane KOMLJEN

    Le jury de la CST a décidé, de décerner le PRIX VULCAIN DE L'ARTISTE-TECHNICIEN à :

    Leslie SHATZ, pour le son du film BIUTIFUL réalisé par Alejandro GONZÁLEZ IÑÁRRITU.

    Vous pouvez par ailleurs revoir cette clôture, ici http://www.festival-cannes.com/fr/mediaPlayer/10858.html .

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    Catégories : PALMARES Lien permanent 0 commentaire Pin it! Imprimer